Critique : Source Code

 

Un film de Duncan Jones. Avec Jake Gylenhaal, Michele Monagha, Vera Farmiga. Sortie le 20 avril 2011

Après un impressionnant coup d’essai (le superbe Moon), Duncan Jones confirme tout le bien qu’on pensait de lui avec Source Code. Un thriller spatio-temporel plus grand public mais pas moins exigeant.

 

Note : 4/5

 

Si Moon n’a pas réussi à ses frayer un chemin vers les salles obscures françaises (messieurs les distributeurs…), sa popularité grandissante au sein des festivals visités aura permis à son réalisateur de se faire un nom sur la scène internationale – autre que celui de son paternel David Bowie il s’entend. Ce fils de …  a du talent, ne restait plus qu’à confirmer la chose avec un second long-métrage six fois plus friqué que son précédent (Moon a été torché avec 5 petits millions $ sans que cela se voit), mais qui pourrait paraître comme une simple commande aussi divertissante qu’impersonnelle. Et pourtant… même si Duncan Jones n’est pas l’auteur du script, que l’on doit au plumitif Ben Ripley (La Mutante 3, aïe !), on comprend pourquoi ce premier a accepté de mettre temporairement en sourdine son alléchant Mute, pour concentrer toute son intention sur ce Source Code explorant quelques obsessions et autres thématiques déjà abordées dans… Moon !

 

Jake Gylenhaal dans "Source Code" de Duncan Jones

 

Venant en donc à ce Source Code qui ne manquera pas d’être défini comme un thriller à la Déjà-Vu aux relents de Code Quantum. On n’en voudra pas de ces étiquettes (forcément réductrices) car la comparaison s’impose dès le pitch : un pilote d’hélicoptère basé en Afghanistan se réveille dans la peau d’un passager d’un train en direction de Chicago. Ce même train qui fut la victime d’un attentat terroriste que le soldat revit en boucle par séquence de huit minutes grâce à un programme expérimental de l’armée cherchant à identifier le responsable de la tragédie qui menace de réitérer son forfait à une plus grande échelle. Côté suspense, ce quasi huit clos temporel (la majeure partie de l’action se déroule dans un wagon et dans le caisson à travers lequel voyage le héros), Source Code tient de la belle mécanique rondement huilée que la mise en scène variée du metteur en scène réussi à mettre en valeur en évitant la redite au gré d’une même séquence répétée. Mais cet argument policier n’est en définitive qu’une simple accroche afin d’inviter le spectateur dans une autre dimension qu’il n’attendait pas forcément.

 

Michelle Monaghan et Jake Gylenhaal dans "Source Code" de Duncan Jones

 

On prendra pour preuve le désintérêt que porte Duncan Jones envers la résolution de cette course contre la montre hitchcockienne (l’identité du poseur de bombe ne vient pas relancer le récit et son sort tient de la pure formalité scénaristique), vraie-fausse conclusion qui va imputer sur le véritable cœur battant du film : la romance entre Jake Gyllenhaal (bouclant dix ans de carrière lancée avec Donnie Darko et s’achevant sur cette seconde réflexion fantastique sur le voyage dans le temps et la réalité alternative) et la délicieuse Michelle Monaghan. D’apparence artificielle (du moins elle l’est au départ) et malgré quelques maladresses inoffensives, l’histoire d’amour impossible (?) entre ce vivant en sursis et une morte constitue le nerf névralgique du film. Oeuvre de science- fiction théologique affirmant au passage une désobéissance citoyenne (chez Duncan Jones l’individualisme devenant l’affirmation existentielle contre l’exploitation massive de l’être humain), toujours payante dans un genre auquel le réal vient apporter une fois de plus une solide pierre blanche.

 

A partir d’un simple divertissement tout public, Duncan Jones opère une malicieuse prolongation réflexive de Moon dont Source Code est le digne jumeau. Intelligent et distrayant, que demande le peuple ?