Critique : Babycall

 
Un film de Pal Sletaune avec Noomi Rapace, Kristoffer Joner. Sortie le 2 mai 2012.

 

Une Lisbeth Salander, l’inégalable hackeuse de la saga Millénium, dotée de capacités surnaturelles ? C’est désormais possible avec Babycall, un thriller psychologique d’une redoutable efficacité.

 

Note : 3/5

 

Cela se confirme. La Suède règne d’une main de maître sur son empire noir, décliné sous les formats les plus divers. Après le phénomène Millénium, best-seller invétéré, et le succès de son adaptation cinématographique (dans laquelle nous retrouvons une certaine Noomi Rapace), la nation agit dans le spectre du géniteur du triptyque, Stieg Larsson.  Et il semblerait que le pays porte à merveille la couleur du deuil. Avec Babycall, on reprend les mêmes et on recommence, à débuter par notre prometteuse actrice, qui incarne une héroïne martyrisée et réalise ici une remarquable performance.  Nous n’en attendions pas moins, d’autant que tous les éléments du genre sont réunis dans ce thriller originaire des pays nordiques : suspense, protagonistes manichéens, alternance des cadences, images aseptisées. Si le scénario se résume en une phrase – Anna élève son fils dans la terreur de voir réapparaître son ex-mari violent et investit, pour tenter d’apaiser ses angoisses nocturnes, dans l’achat d’un babyphone – les choses se révèlent loin d’être simples.

 

Noomi Rapace dans Babycall
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D’une part, il fallait oser mettre sur la pellicule ce sujet délicat et hors norme de la violence sur mineurs. De l’autre, la force du film réside dans la frontière effrayamment franchissable entre le rationnel et l’irrationnel, à l’effigie du déroutant Shutter Island de Martin Scorsese. Pensant détecter la fréquence d’un appareil voisin, Anna bascule-t-elle, à l’instar du marshal Daniels, dans la paranoïa ? Perçoit-elle réellement les lamentations d’un autre enfant en danger ? Semé à travers le point de vue inconstant de la jeune mère, le spectateur divague entre les bons et les méchants, sans parvenir à les départager et ce jusqu’au dernier souffle du long métrage. Dans un état de fragilité émotionnelle inouïe, la véritable interrogation qui subsiste alors est : comment concevoir de tels actes de torture sur l’innocence incarnée ? Quelle déception que le dénouement, tant attendu et finalement prévisible, ne s’avère pas à la hauteur de l’intrigue, mais nous n’en dévoilerons pas davantage…

 

Passé une légère impression de déjà vu, Babycall parvient à nous intriguer et à nous inquiéter, jusqu’à ce que la sauce prenne. Ames sensibles s’abstenir.