Un film de Steven Spielberg. Avec Jeremy Irvine, Peter Mullan, Niels Arestrup. Sortie le 22 février 2012.
Spielberg crie son amour pour le cinéma dans ce récit d’aventure humain et poignant. Au galop !
Note : 4,5/5
Spielberg avait conclu l’année 2011 en beauté avec Les Aventures de Tintin, il inaugure 2012 avec tout autant de panache grâce à Cheval de Guerre. Tiré du livre éponyme de Michael Morpurgo, Cheval de Guerre suit la destinée d’un cheval passant de maitre en maitre alors que grondent les canons de la Première Guerre Mondiale. Un parcours suivi en parallèle par Albert, jeune homme vouant une affection toute particulière au canasson. Un pitch à la fois beau et simple que Spielberg traite avec toute la démesure mais surtout l’humanité qu’on lui connaît. Car plus qu’une histoire de cheval, il s’agit ici d’une histoire d’hommes pris dans le tumulte de l’Histoire. L’occasion pour le papa d’E.T. de revenir aux fondamentaux de son cinéma (on pense beaucoup à Empire du Soleil) tout en convoquant des noms aussi prestigieux que John Ford, David Lean ou encore Victor Flemming. Et quand Spielberg rend hommage au réalisateur de La Prisonnière du désert, le résultat ne peut être qu’éblouissant tant le premier apparaît comme le fils spirituel du second. A l’heure où épique rime avec numérique, le conte animalier de Spielberg est là pour nous rappeler que oui, il reste encore de la place pour du grand cinéma classique au sens noble du terme. Et c’est peut être bien là que réside le charme de cette superbe épopée : dans cette facilité à nous renvoyer à une conception très minérale du cinéma. En excellent narrateur qu’il est, Spielberg parvient à rendre cette chevauchée à la fois fluide et ample. Deux heures trente durant, le spectateur est transporté autre part, dabs une sorte de dimension cinéphilique où la caméra prend son temps pour capter les émotions tout en les retranscrivant avec toute la démesure due au 7eme Art.

D’aucuns diront qu’avec Cheval de Guerre, tonton Spielberg s’est ramolli en pondant un film sciemment destiné à nos chères têtes blondes. Faux et encore faux. Tout naturaliste qu’il soit son film ne sent jamais la naphtaline et s’érige même en vivier de grands moments de cinéma comme en témoigne le morceau de bravoure final dans les tranchées. Beau à pleurer et magistralement réalisé, ce dernier synthétise toute l’essence du métrage qui parvient à faire la jonction entre épique et intimiste avec une facilité déconcertante. Poétique, dure et d’une puissance émotionnelle pouvant déflagrer n’importe quel cœur de pierre elle nous emmène à des cimes rarement atteintes dans une salle obscure. Pour le coté pantouflard on repassera ! Et si Cheval de Guerre prend clairement le parti pris du conte c’est pour mieux lui donner des relents universels. Car ici, le film tient davantage du récit initiatique que du conte pour enfants, tout animalier qu »il soit Albert le cheval n’en est pas moins confronté à l’âpreté de la vie et aux horreurs de la guerre. Guerre qui plane sur le film tel un spectre lancinant, une menace toujours présente. Mais là où le film fait mouche c’est dans sa propension à traduire cette menace avec une économie de moyens qui force le respect. Pas de grands effets ou de moments chocs à la Il Faut sauver le soldat Ryan, juste des images subjectives mais lourdes de sens car totalement laissées à la subjectivité du spectateur. Là encore, l’effet prime sur la démonstration.
Avec tout cela on serait presque tenté d’oublier les protagonistes, charpentes osseuses de ce grand drame animalier et humain. On ne surprendra personne en disant qu’une fois de plus Spielberg s’est entouré d’une belle brochette de comédiens. De Peter Mullan à Niels Arestrup en passant par Tom Hidelston ou le jeune Jeremy Irvine chacun témoigne de cette immense dignité dont Cheval de Guerre se fait le porte étendard. Et le cheval dans tout ça ? Et bien il est magnifique ma foi ! Tout bonnement magistral, le superbe canasson de Spielberg réussit le tour de force de nous émouvoir en étant simplement présent à l’écran. Par un tour de passe passe dont one ne parvient à percer le secret, Spielberg le filme comme un personnage à part entière et l’humanise tout en lui préservant sa grandeur animale. Enfin impossible de faire l’impasse sur l’incroyable musique de John Williams dont la magistrale partition confère une incroyable ampleur au métrage. Jamais une note en trop et des thèmes amenés à rester greffé dans notre cerveau pour très longtemps. C’est bien simple on a pas entendu musique aussi mémorable depuis Jurassic Park. Epique et hippique (elle était facile celle là), la dernière œuvre de Spielberg fait partie de ces moments qui nous font encore croire à la magie du 7eme art et sa puissance comme outil narratif ultime.
Nous emmener vers des cimes d’émotions avec un cheval et un jeune garçon sans jamais verser dans le pathos, voilà toute la force du dernier né spielbergien. Chapeau bas !