Critique : Detachment

 
Un film de Tony Kaye. Avec Adrien Brody, Marcia Gay Harden, James Caan. Sortie le 1er février 2012.

 

« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir » chantait Johnny. C’est un peu l’impression que l’on a en sortant de la séance, les tripes quelques peu retournées par cette critique sociale de l’enseignement et de la famille, une oeuvre humaniste et très sombre.
 
 

 NOTE 3/5

 

Pour son deuxième long-métrage après American History X, Tony Kaye s’intéresse à la crise de l’enseignement public et à la démission du personnel éducatif et de la famille. Point de néo-nazis cette fois-ci mais plutôt une bande d’adolescents désenchantés (presque) sans avenir et une équipe d’enseignants tout aussi désespérés. Le scénario, écrit par un ancien professeur du public, donne un peu plus de crédibilité et de réalisme à une mise en scène parfois proche du documentaire.  On pourrait se dire « encore un film sur un lycée difficile », avec ses clichés sur les enfants d’ouvriers, les immigrés, les gros, les moches, les handicapés. De The Substitute à Esprits Rebelles, le cinéma américain s’est souvent penché du côté de ces héros du quotidien, les enseignants, qui redonnent de l’espoir à une génération qui en manque cruellement. Detachment propose moins un portrait du lycée que du quotidien des professeurs et des élèves et surtout celui de Henry Barthes (Adrien Brody) qui doit jongler entre un grand-père malade qui perd la tête et une ado prostituée qu’il a recueillie dans la rue. Detachment c’est surtout l’immersion dans la vie d’un professeur, son journal intime symbolisé par les plans où Henry Barthes est seul face à la caméra et où il parle de son métier.

 

Adrien Brody et Betty Kaye dans Detachment de Tony Kaye
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Ce film est aussi une réflexion sur la société actuelle, avec ses jeunes en difficulté, ses enseignants dépassés et suffisamment occupés avec leur vie à problèmes, sans oublier les parents qui démissionnent. Les ados ne peuvent pas s’aider eux-mêmes si on ne les aide pas. On se rend compte à quel point le métier d’enseignant est dur, avec une autorité jamais évidente à faire respecter et surtout lorsque la vie privée est remplie de malheurs, de difficultés et de solitude.  Le casting est prestigieux avec, entre autres, une « drôle de dame » (Lucy Liu), la  maman de Gwyneth Paltrow (Blythe Daner) ou un ancien mafieux (James Caan). Petit bémol : si les personnages de professeurs sont nombreux, ils ne sont pas assez développés, cantonnés presque à une seule scène importante chacun.  Pour son premier rôle  Betty Kaye (fille du réalisateur) se révèle impressionnante en ado obèse mal dans sa peau et dont le rôle prend de plus en plus d’importance à mesure que l’histoire progresse.
 
 

Mieux vaut prendre un bon anti-dépresseur avant d’aller voir ce film d’une grande noirceur, réaliste et mis en scène avec pudeur.