Critique express : Ex Machina

 

Un film d’Alex Garland. Avec Domhnall Gleeson, Alicia Vikander, Oscar Isaac. Sortie le 3 juin 2015.

 

Le scénariste attitré de Danny Boyle s’essaye à la réalisation et accouche d’une fable cruelle et maligne.

 

Note : 3.5/5

 

La S.F., Alex Garland, ça le connait qu’il verse dans le space opera à tendance métaphysique (Sunshine) ou l’actioner vener’ (Dredd). Aussi quand pour sa première réalisation, le scénariste de 28 jours plus tard s’attaque au thème de l’intelligence artificielle, le résultat ne peut qu’être grisant sinon intriguant. Ce qui est le cas avec Ex Machina qui suit une semaine très particulière dans la vie de Caleb, jeune programmateur invité à passer un séjour chez son PDG dans un lieu reculé pour « tester » sa dernière nouveauté : Ava, un robot révolutionnaire adoptant les traits d’une superbe jeune femme. Très rapidement, le jeune homme va découvrir que les apparences peuvent être sacrément trompeuses, mais n’est-il pas déjà trop tard ? Ce qui fait l’attrait d’Ex Machina réside moins dans les questions qu’il soulève que dans la manière dont il le fait. A l’aide d’une direction artistique à tomber par terre et d’un sound design particulièrement travaillé, le cinéaste parvient à créer une ambiance délétère. Et c’est bien ça là que réside la spécificité et la force d’Ex Machina : dans cette propension à sortir le spectateur de sa zone de confort au point de le faire constamment douter. A l’image du personnage de Nathan incarné par un Oscar Isaac génial de duplicité, le film séduit, intrigue avant de provoquer une forme de malaise qui ira crescendo jusqu’à son final aussi machiavélique que logique. Sauf que là où d’autres auraient joué au petit malin par le truchement du twist faussement novateur, Garland préfère lentement mais surement tisser sa toile en toute transparence avant de laisser le piège se refermer. Ainsi, on pourrait considérer Ex Machina non pas comme une énième réflexion sur les limites de l’intelligence artificielle mais plutôt comme un brillant exercice de style sur la notion même de manipulation, une sorte de film noir 2.0 dont les figures archétypales se verraient perverties pour n’être que les rouages d’une mécanique implacable. Fortement sous influences, il peut se concevoir comme une variation robotique de L’ile du Docteur Moreau auquel il emprunte de nombreuses choses et dont on ressort avec un indicible malaise. Ex Machina, malgré un manque d’ambition narratif certain, a au moins le mérite de ne pas laisser indifférent.

 

exmachina
Universal Pictures

 

 

Cruel et déstabilisant, Ex Machina ne révolutionnera pas le genre mais lui insuffle une perversité bienvenue.