Critique : Fast & Furious 6

 

Un film de Justin Lin. Avec Paul Walker, Vin Diesel, Dwayne Johnson. Sortie le 22 mai 2013.

 

Qu’importe la vraisemblance pour peu que la tôle froissée soit là… tel est le credo de ce sixième opus de destruction massive !

 

Note : 3/5

 

En 2011, Fast & Furious 5 réalisait l’impensable : emmener la licence vers de nouveaux cimes en alliant allégrement film de casse et divertissement tuné. Laissant partiellement de coté l’aspect bling bling de ses prédécesseurs, le film témoignait d’une ambition nouvelle pour un titre sur laquelle on ne misait plus grand chose depuis bien longtemps. Enfin pas tout à fait car aussi conspué fut il, Fast & Furious 3 était déjà symptomatique d’une envie de renouveau (avant de retomber comme un soufflet avec l’efficace mais anecdotique Fast & Furious 4). Un virage qui coïncidait pile poil avec l’arrivée de Justin Lin aux manettes. Dès lors, on était loin de penser que cet opus allait devenir le centre gravitationnel d’une saga qui n’aurait de cesse d’évoluer en créant des liants. Exit l’aspect purement mécanique et interchangeable des intrigues, les prochains Fast & Furious allaient désormais constituer un tout où chaque opus répondrait à l’autre. Symptomatique de cette appétence nouvelle, le cinquième volet jouait carrément la carte de la réunion de famille en convoquant les personnages les plus emblématiques de la saga. Soudain, une ère nouvelle s’ouvrait et avec elle l’irrésistible envie de revisiter la série en prenant le 3ème épisode comme point d’ancrage. Graduellement donc, la saga gagnait en maturité jusqu’à ce fameux 5ème volet qui le sortit définitivement de l’ornière dans laquelle elle avait été terrée depuis le début. Bigger, better & louder,  FF5 a placé la barre très haut tant en terme d’action que d’intrigue avant de se clore par une séquence post générique au cliffhanger énorme. Impossible pour sa suite donc se situer un cran en dessous surtout quand le terrain a été aussi bien balisé.

 

© Universal Pictures
© Universal Pictures

 

Sur ce plan pas d’inquiétudes : FF6 maximise la formule précédemment consacrée en jouant à fond la carte de la surenchère. Terriblement efficaces et réussies dans FF5, les séquences d’action pulvérisent ici littéralement toutes limites spatiales et humaines. Une approche à double tranchant car se révélant aussi grisante que frustrante. Au petit jeu de la comparaison on pourra arguer que les scènes d’action de FF5 de par leur lisibilité et leur coté « terrien » parvenaient à dessiner un semblant de ludisme. De façon réflective, FF6 joue tellement la carte du miroir grossissant qu’il accouche de séquences d’actions si impressionnantes qu’elles en deviennent totalement invraisemblables. Le film en met plein les yeux mais de manière tellement outrancière qu’elle annihile partiellement tous réels enjeux. On s’amuse, souvent comme un petit fou, mais on se sent parfois exclu. A trop avoir les yeux plus gros que le ventre, le métrage finit par se perdre dans d’inutiles chemins de traverse et a ne plus exister que par et pour des scènes d’action qui gagnent en efficacité pyrotechniques ce qu’elles perdent en lisibilité. Pas de quoi cependant crier au massacre épileptique façon John Moore, Justin Lin se montrant bien plus compétent et efficace que le « réalisateur » du nullissime Die Hard 5. Ici, le spectacle est garanti, voire même carrément jouissif lorsqu’il pousse l’action dans ses retranchements, mais ne prend jamais vraiment aux tripes. Non pas que trop d’action tue l’action mais des respirations plus naturelles et moins artificielles (comprendre par là qui ne font pas office de remplissage) n’auraient pas été de trop.

 

 

© Universal Pictures
© Universal Pictures

 

Reste qu’en la matière, le film se situe clairement en haut du panier, car s’il se révèle moins surprenant que son ainé, ses apparents défauts sont paradoxalement ses meilleures qualités.  Une fois accepté qu’il fera davantage dans l’évolution que dans la révolution, force est de reconnaître qu’il procure un vrai plaisir de spectateur. Encore faut il pour cela l’intégrer dans sa dimension d’expérience collective où chaque morceau de bravoure, poses badass et autres répliques assassines se voient suivi par sa cohorte d’applaudissements et autres manifestations de joies. Dès lors, l’aspect bigger prend tout son sens et l’on prend littéralement son pied devant deux heures dix menées à pleins gaz, ponctués ici et là par des morceaux de bravoures relevant presque à chaque fois du choc de titans tour à tour automobiles (impressionnantes scènes de poursuites) ou humain (merci Vin et Dwayne !). A sa manière, FF6 apporte sa pierre à l’édifice solidement bâti par Justin Lin en introduisant le premier bad guy véritablement intéressant de la saga. Pour la première fois, émerge la figure du Némésis en la personne d’Owen Shaw, sorte de double maléfique de Dom (Vin Diesel). Impeccablement interprété par un Luke Evans diabolique à souhait, il  est à la tête d’une équipe de choc dont chaque membre serait le reflet grossissant d’un des personnages principaux. Un jeu de miroirs que le réalisateur à l’intelligence de ne pas trop surligner préférant laisser les antagonismes s’exprimer au cours de manos a manos savamment orchestrés. De quoi amener un peu de piment dans une saga qui, à vouloir trop en faire,  pourrait facilement tomber dans son propre piège pour peu que ses ambitions ne soient pas mieux jugulées… un peu comme une route qu’on rechignerait à désengorger par peur de la voir se vider totalement !

 

 

A défaut d’être aussi surprenant que son prédécesseur, Fast & Furious 6 s’inscrit dans sa droite lignée en faisant preuve d’une démesure toujours plus grande.


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