Critique : Les 4 Fantastiques

 

Un film de Josh Trank. Avec Miles Teller, Kate Mara, Jamie Bell. Sortie le 5 aout 2015.

 

 

Les 4 Fantastiques se refont une santé dans un reboot frustrant malgré de jolies idées.

 

Note : 2/5

 

Malmenés sur grand écran que ce soit sous la houlette de Roger Corman ou de Tim Story, Les 4 Fantastiques méritaient bien une réhabilitation cinématographique. La rédemption allait-elle passer par Josh Trank ? D’une certaine façon oui. Avec son premier film Chronicle, Josh Trank et son scénariste Max Landis ambitionnaient clairement de donner un sérieux coup de fouet à deux genres très codés : le found footage et le film de super-héros en s’attachant davantage aux personnages qu’à leurs pouvoirs. Bien qu’un peu roublard, ce mix à peine voilé entre Les 4 Fantastiques (déjà !) et Akira , suintait tellement l’amour pour le comic book movie qu’on espérait secrètement que cette grosse carte de visite tombe un jour sur le bureau d’un exécutif de Marvel ou de DC. Et ce qui devait arriva : Marvel n’a pas tardé à mettre son grappin sur le jeune prodige trop heureux de pouvoir enfin réaliser son rêve. Une bien belle success story dont le point d’orgue aurait pu être un grand film mais… Aussi vrai que l’enfer est pavé de bonnes intentions, ce nouveau 4 Fantastiques laisse suggérer que ce reboot s’est apparenté à un véritable chemin de croix pour le cinéaste. Et pourtant, force est de reconnaitre que le film commence sous les meilleurs auspices. Si l’on fait abstraction des quelques aberrations chronologiques visant à nous faire croire que Miles Teller et Jamie Bell n’ont pas plus de quinze ans chacun (beaucoup plus tard dans le film, on verra sur un ordinateur que la Chose est née en 1986 soit 21 ans avant sa première rencontre avec Mr Fantastic alors qu’ils étaient enfants !), on se prend tout de suite d’affection pour nos quatre héros en devenir. La volonté de Trank est claire : s’éloigner le plus possible du giron Marvel en donnant à son film une tonalité plus intimiste, personnelle. En ce sens, la première partie demeure des plus honorable avec une mise en place certes un peu longue mais permettant de dessiner des personnages attachants aux caractères bien trempés. Et alors que l’on redoutait que leurs pouvoirs rendent nos quatre compères ridicules, Trank réussit là où ses prédécesseurs ont lamentablement échoués en rendant ses 4 fantastiques crédibles. Un véritable tour de force qui aurait pu accentuer la puissance émotionnelle qui émane du film dans son premier tiers si la production n’avait pas décidé de reprendre rapidement les commandes.

 

20th century fox
20th Century Fox

 

Dès lors, ce qui s’annonçait comme une allégorie plutôt finaude sur la famille recomposée se délite peu à peu pour se muer en pur produit « marvelien » dont la vitesse d’exécution trahit une absence totale d’écriture. Il en résulte un film bicéphale à cheval entre deux ambitions, deux visions différentes et dont l’issue ne peut se solder que par la mort symbolique d’une de ses têtes pensantes. Une fois les 4 fantastiques révélés aux yeux des spectateurs, le film échappe totalement au contrôle de Trank et se transforme en long trailer bâclé tant sur le fond que sur la forme. Un écueil cristallisé par le retour ou plutôt l’émergence de Fatalis (personnage le plus approximatif du film) lors d’un climax totalement raté et abscons. Les coupes sont là bien visibles et l’impression d’assister à un bon gros accident industriel, torché à la hâte avant que Marvel reprenne ses droits sur la licence. Les 4 fantastiques apparait non plus comme le désastre tant annoncé que comme un dommage collatéral dans la croisade menée par Marvel pour récupérer ses licences et surtout le bras de fer perdu d’avance entre Josh Trank et le producteur Simon Kinberg. En confondant vitesse et précipitation, la production exsangue le film de toute personnalité, le condamnant par là même à figurer au panthéon des plus grosses baudruches de l’été là où il aurait pu se distinguer par son coté éminemment personnel. Un comble de la part du studio qui nous a offert les Marvel les plus politiques et subversifs de ces dernières années. Un lot de belles promesses tuées dans l’œuf qui nous font d’autant plus espérer l’arrivée d’un Director’s Cut.

 

A cheval entre émouvant teenage movie et blockbuster totalement bâclé, Les 4 Fantastiques laisse un arrière-gout amer dans la bouche, celui d’une œuvre pleine de promesses sacrifiée sur l’autel de l’opportunisme.