Un film de Gore Verbinski. Avec Johnny Depp, Arnie Hammer, Helena Bonham Carter. Sortie le 7 aout 2013.
Gore Verbinski et Johnny Depp nous emmènent dans les contrées lointaines de l’Ouest sauvage. Une promenade de sante ?
Note : 2/5
Alléluia ! C’est aujourd’hui que sort le blockbuster estival de Disney précédé comme à son habitude d’une belle campagne de promotion destinée à nous mettre gentiment la pression. Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué c’est bien de Lone Ranger qu’on parle. Le nouveau délire du duo Gore Verbinski/Johnny Depp va t il booster un été plutôt morne ? Pas vraiment ! Projet maudit qui a coulé en raison de son budget gargantuesque avant de ressusciter miraculeusement, Lone Ranger suscitait beaucoup d’attentes non seulement en raison de sa genèse houleuse mais aussi et surtout parce que dès le début l’accent fut mis sur son caractère singulier. Verbinski et Depp ayant parfaitement réussi leur opération de piratage du western avec l’excellent Rango, tous les espoirs étaient permis quant à un éventuel nouvel abordage, live cette fois. Une velléité qu’on retrouve en partie mais malheureusement diluée au sein d’une opération beaucoup trop onéreuse pour laisser passer le moindre dérapage. Avec Lone Ranger, les ambitions de Disney sont claires : réitérer le hold up Pirates des Caraïbes version western. Quant à celles du réalisateur et de sa vedette on les imagine tout autres et surtout motivées par l’envie d’insuffler un peu de personnalité au sein d’une commande disneyenne. Sauf que voilà : si on imagine le réalisateur de Rango pétrit des meilleures intentions (et on ne fait que supposer), il aura eu bien du mal à gagner face au géant qui s’imposait devant lui. Un doux paradoxe quand on sait que le premier a offert au second l’une de ses franchises les plus rentables. Sur le papier, Lone Ranger donne l’eau à la bouche et promet un spectacle tonitruant et atypique dont le tour de force sera non pas de se reposer sur le personnage titre mais sur son sidekick. A l’écran, le résultat, tout autre, donne l’impression de se retrouver devant un long métrage malade naviguant à vue entre parodie et hommage révéré. Un mauvais dosage qui se ressent jusque dans le rythme du film déroulant une intrigue qui aurait pu etre facilement bouclée en moins de deux heures. Sauf que voilà : Lone Ranger est un projet maousse et il faut que ça se voit si ce n’est à travers les images (on se demande clairement où sont passé les 250 millions de dollars de budget) au moins que ça soit dans la durée quitte à jouer inutilement les prolongations.

A trop hésiter entre 1er et second degré, le film ne semble plus savoir où donner de la tête rappelant au mieux les douces incartades du Shérif est en prison, au pire le désastre Wild Wild West. Et il faut bien le reconnaitre : dans la catégorie iconoclaste, Lone Ranger lorgne plus du coté du second que du premier ! Un équilibrage mal dosé qui, au lieu, de créer un sentiment de doux décalage, donne au contraire la pleine mesure de l’accident industriel qui se déroule sous nos yeux. Car il faut bien avouer que toute la partie comédie a bien du mal à fonctionner entre des blagues répétitives tombant toujours à plat (« étrange cheval ») et un Johnny Depp peu investit. Cabotin mais pas trop, l’acteur en pilotage automatique, offre une prestation poussive comme s’il semblait déjà avoir compris que le projet était voué à un échec artistique certain. Entre Tonto et son Chapelier Fou c’est à se demander si le comédien n’aurait pas trop vite cédé à certaines sirènes au point d’avoir perdu toute personnalité. A ses cotés, Arnie Hammer fait toutefois office de belle surprise et représente la véritable révélation du film. Parfaitement crédible en héros malgré lui, il offre un parfait contrepoint et jongle à merveille entre sérieux papal et distance salutaire. Ce n’est heureusement pas le seul point positif d’un métrage qui évite le ratage complet grâce à la réalisation très efficace de Verbinski et des morceaux de bravoure témoignant d’une sacrée pêche. A l’image d’une dernière partie rigolote et traversée de cette folie qui manquait grandement pendant deux heures. La partie western n’est pas mieux servie et regorge de bonnes idées tour à tour mal exploitées (la narration éclatée réduite ici au rang de gimmick) ou sacrifiées sur l’autel du politiquement correct (la personnalité névrotique de Tonto). Autant de fulgurances qui laissent augurer de ce qu’aurait pu être vraiment Lone Ranger : un méta western posant sur le genre un regard à la fois sombre et mélancolique mais traversé d’une réelle volonté d’offrir au public un spectacle digne de ce nom via une iconisation dument pensée. C’est peut être trop mettre au crédit de Gore Verbinski, réalisateur sous estimé et réduit prématurément à l’état de yes man docile. Si Lone Ranger donne raison à ses détracteurs, il démontre aussi que le monsieur n’est pas dénué de personnalité, encore faudrait il que celle-ci puisse s’épanouir. Au regard du résultat et de la filmographie du bonhomme une chose est sure : ça ne pourra être le cas qu’au travers de projets plus modestes… pour le moment !
Aseptisé, Lone Ranger est un film bicéphale, une sorte de gâchis fascinant laissant souvent un entrevoir un potentiel totalement bridé.
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