Critique : Machete Kills

 

Un film de Robert Rodriguez. Avec Dany Trejo, Michele Rodriguez, Mel Gibson. Sortie le 2 octobre 2013.

 

Machete revient et il n’est pas content dans cette suite dopée à la Tequilla frappée !

 

 Note : 3/5

 

Trois ans après un premier opus placé sous le signe du grindhouse qui tache, le grand Machete revient avec pertes et fracas. Pour cette suite placée sous le signe de la démesure, l’as de l’arme blanche est chargé par le Président des Etats Unis, d’arrêter un révolutionnaire mégalo menaçant de rayer les Etats Unis de la carte. Sauf que notre espion de choc va bientôt se retrouver face à un ennemi bien plus dangereux. Bigger, better, louder…. A première vue, Machete Kills remplit fort bien son cahier des charges de suite dépassant son prédécesseur. Il est vrai que là tout est vu à une plus grande échelle que ce soit au niveau de l’intrigue très James Bond période 60’s ou de l’action généreuse quand il s’agit de tout faire péter ou d’arracher des tripes dans la joie et l’allégresse. Oui, Machete Kills est un énorme bordel qui a partiellement abandonné le coté révérenciel au grindhouse pour se muer en pelloche énervée à la lisière entre le cartoon live et la semi parodie parfaitement assumée. De là à dire que cette suite est meilleure il y a un pas difficilement franchissable tant le premier opus a des qualités que le second n’a pas et inversement. Là où Machete faisait preuve d’une certaine rigueur (sagesse diront certains), sa suite prend le pari de tout exploser en termes de trouvailles aussi bien narratives que visuelles. Une optique à double tranchant car si Machete Kills s’accorde plus de libertés et embrasse totalement son statut d’actioner flirtant volontairement avec le nanar, son coté foutraque se révèle beaucoup plus éreintant que chez son grand frère. En gros : mettez votre cerveau en veille car c’est un gros bordel !  Non, le film de Rodriguez n’a plus rien de sérieux et c’est tant mieux. Car non content d’être une comédie d’action totalement délirante et capitalisant énormément sur le charisme de son rôle-titre, Machete Kills est LE film qui permet enfin à Rodriguez de s’assumer en tant que réalisateur Bis trouvant ici un formidable terrain d’expérimentation. Tel un ado qui aurait rouvert son vieux coffres à jouets, Rodriguez retombe en enfance et nous fait partager son plaisir de la régression.  Délesté de toutes velléités mainstream, il accouche d’un « film tacos » dans lequel il peut fourrer tout ce qu’il peut ou veut quitte à provoquer l’indigestion.

 

© Wild Bunch Distribution
© Wild Bunch Distribution

 

C’est le principal point noir de cette série B qui, à trop vouloir en faire finit par quelque peu perdre le spectateur. Gavé de gags, scènes chocs et autres punchlines, celui-ci n’a que peu de temps pour la digestion. D’autant plus dommage que lorsqu’il joue la carte de la parodie bondesque, le film fait souvent mouche. Preuve en est avec un Mel Gibson tout simplement génial en bad guy absolu, sorte de croisement entre Dr No et un Tony Stark diabolique faisant la loi à coups de blasters et autres inventions totalement improbables. Des touches de folie comme ça, Machete Kills en contient à la pelle. Malheureusement elles sont beaucoup trop nombreuses pour réellement impacter, chacune venant annuler l’autre très rapidement. Coté casting, on regrettera une profusion de seconds rôles pourtant savoureux ( Desdemona, El Camaleon…) se disputant des temps de présence à l’écran souvent frustrants. Cependant, l’immense coolitude de Dany Trejo et la décomplexions parfaitement assumée de l’ensemble rendent l’expérience très jouissive à défaut d’en imposer visuellement (c’est souvent assez laid). Alors non Machete Kills ne révolutionnera pas le genre et ne le rendra pas plus respectable mais il a ce coté vilain petit canard qui suscite immédiatement la sympathie. En l’état, le film n’ambitionne rien d’autre que d’être une production très Bis et se revendique totalement telle quelle. Ainsi, on pourra difficilement reprocher à Rodriguez d’être cynique tant sa sincérité se voit à l’écran. Si celle-ci est parfois traduite de façon maladroite elle a au moins le mérite d’exister et reflète parfaitement une filmographie qui n’aura jamais été aussi intéressante que lorsqu’elle se situait un peu à la marge. Machete Kills est d’une certaine façon le film du coming out cinématographique de Rodriguez, celui qui lui permettra – on l’espère- de réaliser qu’à défaut d’être un auteur tarantinesque, il reste un artisan au sens noble du terme capable du meilleur comme du pire.

 

Totalement décomplexé, Rodriguez accouche d’un pur plaisir coupable, une bisserie parfaitement assumée et attachante même dans ses nombreux défauts.

 

 



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