Critique : Noé

 

Un film de Darren Aronofsky. Avec Russell Crowe, Jennifer Connelly, Emma Watson. Sortie le 9 avril 2014.

 

Trois ans après le succès de Black Swan, le réalisateur Darren Aronofsky revient sur les écrans avec un « blockbuster » épique où il donne sa propre vision de l’histoire biblique de Noé et de son Arche. Déluge de démesures ou flot d’inspiration ?

 

Note: 3,5 / 5

 

A l’instar de The Fountain, Noé est, pour Darren Aronofsky, une nouvelle adaptation d’un roman graphique dont il est l’auteur. Il ne s’agit donc pas d’une fidèle adaptation de la célèbre histoire de la Genèse telle que nous la connaissons. Ce projet, pensé depuis son premier film Pi, trouve enfin vie à l’écran malgré les polémiques religieuses évidentes et surtout des différents de production avec remontages à la clé. Pour une fois, le réalisateur bénéficie d’un budget à la hauteur de ses ambitions. Chassons tout de suite le doute sur l’intégrité de l’auteur passé au blockbuster, Noé n’est pas un énième film hollywoodien pop-corn qui se moquerait de son public. Nous retrouvons le réalisateur de Requiem for a dream avec une partie de son équipe technique et artistique habituelle. À commencer par Ari Handel qui revient au scénario avec le metteur en scène après The Fountain ; il est intéressant de voir ici l’angle choisi pour traiter le personnage de Noé dont la foi aveugle qu’il voue au Créateur rappelle l’obsession de Tom Creo face à la mort inévitable de sa femme. D’ailleurs, l’idée de la mort comme étant une renaissance se retrouve également ici. Handel et Aronofsky sondent en partie les arcanes du personnage principal au détriment des autres aspects connus de l’histoire du Déluge. Évènement forcément spectaculaire, la montée des eaux ne l’est pas autant à l’écran tout comme la présence des animaux pour lesquels Noé fonde l’Arche. Présentés par un plan large majestueux avant d’y rentrer, les couples animaliers n’interagissent pas avec la famille de Noé et n’ont droit qu’à de vulgaires et heureusement furtifs « stocks shots » (série d’images empruntées à des documents d’archives) à la sortie de la famille rescapée. Outre les priorités scénaristiques, les éléments essentiels de cette Histoire sont tout de même présents.

 

© Universal Pictures
© Universal Pictures

 

Mais ces priorités vont devenir au fur et à mesure, les maillons faibles du métrage. Si l’imaginaire de Darren Aronofsky éblouit à l’écran grâce à des effets spéciaux aussi modernes que rétro (mentions spéciales à la superbe séquence sur la Création de la Terre en animation photo et aux rocailleux Vigies, remplaçant les Néphilim, animés en stop motion façon Ray Harryhausen), nous sentons bien que le film est scindé en deux parties et que la dernière est celle qui plaît le plus au réalisateur. Non pas que la première soit laissée pour compte mais il est clair que la complexité du personnage de Noé s’intensifie une fois confiné dans l’Arche. Porté par un Russel Crowe imposant et barbu, Noé se retrouve seul contre tous (sa femme, ses enfants et son ennemi clandestin Toubal-Caïn) et face au choix de servir le Créateur à n’importe quel prix ou d’écouter son cœur. Si le casting est de bonne facture, nous pouvons regretter les effets larmoyants auxquels Darren Aronofsky a recours via des plans insistant sur les personnages. Plus encore, les personnages de Noé, Mathusalem et Toubal-Caïn auraient pu être plus approfondis au lieu de servir de simples – mais intéressants – ressorts dramatiques. Néanmoins, Darren Aronofsky offre bel et bien une vision épique et inspirée de l’histoire du bâtisseur de l’Arche qui ne laissera pas indifférent.

 

Noé fera date dans les blockbusters bibliques engendrés par Hollywood pour la vision originale de son auteur.

 

 



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