Critique : Poltergeist

 

Un film de Gil Kenan. Avec Sam Rockwell, Rosemarie De Witt, Jared Harris. Sortie le 23 juin 2015.

 

Une copie trop conforme pour être mémorable mais suffisamment respectueuse pour susciter la sympathie.

 

Note : 2.5/5

 

Je vous parle d’un temps que les moins de trente ans ne peuvent pas connaitre, Hollywood en ce temps-là résonnait encore du bras de fer (que tout le monde connait mais dont personne ne parle) entre Steven Spielberg et Tobe Hooper respectivement producteur et réalisateur du cultissime Poltergeist. Et si ce titre ne vous dit rien, pas de panique : la 20th Century Fox va se faire un plaisir de le graver dans votre mémoire via ce remake qui, s’il ne s’imposait pas vraiment en soi, ne fait pas non plus vraiment de mal. Loin d’être aussi catastrophique que nombre d’autres remakes arrivant régulièrement sur les écrans, ce Poltergeist nouveau a pour lui d’être relativement respectueux de son modèle. On saura ainsi gré aux instigateurs de cet objet totalement inoffensif de ne pas avoir opté pour le sacro-saint found footage et/ou opter pour une approche résolument orientée 2.0 à l’instar de l’insupportable Unfriended qui sort le même jour. Très (trop ?) classique dans sa forme, Poltergeist raconte toujours la même histoire : celle d’une famille d’américains moyen confrontés aux vilains fantômes habitant la maison dans laquelle ils viennent d’emménager. Du film original ce remake en conserve l’esprit et la structure allant même jusqu’à reproduire certaines scènes clés et s’autorise quelques libertés malheureusement peu exploitées. Les fans du film matriciel, s’ils se donnent la peine de se déplacer, risquent donc de se retrouver en territoire connu et trouver l’expérience assez vaine. Si c’est effectivement le cas, il ne faut pas oublier que cette nouvelle monture s’adresse avant tout à ceux n’ayant jamais entendu parler du Poltergeist de Tobe Hooper.

 

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20th Century Fox

 

Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’effet est garanti chez les non-initiés qui se laisseront à coup sûr prendre au piège des quelques jump scares dissimulés ici et là. Ainsi, le film n’est pas tant à voir comme une relecture que comme une honorable porte d’entrée vers le film original, posant in fine la question des mécanismes de la peur dans le cinéma actuel. Un exercice beaucoup plus probant avec Insidious, remake à peine voilé de Poltergeist, mais qui trouve ici une résonance particulière eu égard à la présence de Gil Kenan derrière la caméra. Un choix loin d’être hasardeux puisque c’est à ce dernier que l’on doit l’excellent Monster House, superbe variation animée sur le thème de la maison hantée. Et si ce nouveau Poltergeist manque cruellement d’audace et d’inventivité sur le fond, la forme, elle, se révèle particulièrement soignée, via une formidable gestion de l’espace. A l’image de Monster House, Kenan fait de son espace domestique un personnage à part entière dont il sonde les affres à travers une caméra d’une fluidité exemplaire. Discrète, sa mise en scène, n’en demeure pas moins étonnamment immersive et rend cette nouvelle visite de la maison maudite beaucoup moins inepte que redoutée. Et c’est bien cet emballage très soigné qui donne à ce remake un charme particulier. Certes, à trop verser dans la révérence et le fan service, le film finit par se brider totalement mais sa démarche reste tellement sincère qu’elle en devient touchante même dans ses plus gros écueils. A trop se soucier de ne pas trahir l’esprit de son modèle, Kenan reste caché dans l’ombre encore bien prégnante de Tobe Hooper. C’est à la fois sa plus grande force et sa pire faiblesse.
 
 

N’inventant strictement rien, ce nouveau Poltergeist est tout autant un hommage qu’une copie carbone du chef d’œuvre de Tobe Hooper. Pas de quoi se lever la nuit ou crier au scandale !