Critique : Renaissances

 

Un film de Tarsem Singh. Avec Ryan Reynolds, Ben Kingsley, Matthew Goode. Sortie le 29 juillet 2015.

 

Ryan Reynolds et Ben Kingsley jouent à volte-face dans un thriller futuriste sympathique mais manquant cruellement de personnalité !

 

Note : 2.5/5

 

Avec son affiche bleutée et sa typo très futuriste, Renaissances a de furieux airs de Looper. Une impression renforcée par une citation – forcément anonyme – le comparant sans vergogne à la pépite de Rian Johnson et à l’excellent Source Code. Malheureusement, au risque de mettre à mal une stratégie marketing un poil trop fumeuse trahissant une incapacité évidente à vendre le film, Renaissances n’entretient strictement aucun rapport avec les deux œuvres auxquelles il est pompeusement comparé. Jugez plutôt : milliardaire condamné par une maladie incurable, Damian Hale (Ben Kingsley) accepte de participer à une opération révolutionnaire lui permettant de voir son esprit transféré dans un corps tout nouveau tout beau. Arborant désormais les traits d’un jeune homme athlétique (Ryan Reynolds), il va bientôt découvrir que «  l’enveloppe » qu’il a emprunté n’est pas si neuve que ça ! Un pitch qui n’est pas sans rappeler le sympathique Freejack dans lequel un pilote de Formule 1 propulsé dans le futur était poursuivi par des mercenaires travaillant pour un mystérieux commanditaire désireux d’adopter ses traits pour pécho René Russo (et ouais on est les pros de la rime qui claque sur Cinevibe !). Mais revenons un peu à nos moutons électriques : à l’image de son personnage principal, Renaissances est une œuvre schizophrène. Il faut dire qu’aux commandes on retrouve l’esthète Tarsem Singh (Les immortels) qui délaisse son univers bariolé et ultra léché pour un environnement beaucoup plus froid et posé. Car s’il n’est pas franchement désagréable pour un divertissement estival, Renaissances n’en demeure pas moins aussi banal dans son exécution que sympathique dans sa volonté de verser dans la série B honnête et sans fioritures. Comprendre par-là que l’ensemble se suit sans ennui mais sans passion non plus. Renouer avec un certain pan de la S.F. parano pourquoi pas encore faut-il y apporter du sang neuf.

 

SND
SND

 

Ce qui n’est clairement pas le cas ici malgré une poignée de bonnes idées et une ambiance délétère dans sa seconde partie. Gentille variation sur le thème du capitalisme sauvage et de la marchandisation des corps, Renaissances ne manque pas de charme mais arrive avec une bonne décennie (voire plus) de retard. Mais à y regarder de plus près, Renaissances pourrait se révéler bien plus intéressant. Avec son héros en quête d’identité condamné à errer dans les pompes d’un autres, Renaissances ne se poserait-il pas en allégorie du carcan dans lequel s’enferme un cinéma de genre en voie d’uniformisation? Tout comme Damian Hale, Tarsem se voit contraint de se glisser dans la peau d’un autre (le yes man docile et efficace) pour survivre au sein d’un environnement qui le pousse vers sa date de péremption. Ex grand espoir du 7eme art, radical dans ses choix, touchant dans sa propension à sublimer le kitsch, le voici soumis aux desiderata d’une industrie qui rejette sa forme actuelle. Car bien malin sera celui qui arrivera à déceler la patte du monsieur dans cette chasse à l’homme aux airs de DTV de luxe. Une grille de lecture qui accentue l’atmosphère paranoïaque nimbant le film tout du long. De par sa volonté de verser constamment dans le consensus, le film met en lumière un certain nombre de symptômes gangrenant la série B. Il en résulte une œuvre correcte aussi sympathique dans son coté suranné que frustrante dans sa volonté de ne jamais transcender son sujet.

 

Une addition de talents (les frères Pastor au scénario, Tarsem derrière le caméra…) pour un résultat au final assez banal. Dommage pour peu qu’on ne prenne pas le film pour ce qu’il est… un fascinant accident industriel !