Séance de rattrapage : critique Paul

 

Un film de Greg Mottola. Avec Simon Pegg, Nick Frost, Jason Bateman. Sortie le 2 mars 2011

 

Après Shaun of the Dead et Hot Fuzz, Simon Pegg et Nick Frost s’expatrient aux states et font la rencontre d’un drôle d’alien. Geeks de tous poils, please stand up !

Note : 3,5/5

 

Geek… voilà le mot est lâché ! Si l’on devait trouver un dénominateur commun entre le binôme Simon Pegg/Nick Frost et la nouvelle vague de la comédie US initié par Judd Apatow, il tiendrait là : dans sa peinture de l’adulescent, ce grand gamin plus enclin à se plonger dans l’univers d’un World of Warcraft que dans les affres du monde réel. Si nos deux sales gosses anglais creusent la question depuis le culte Spaced en 1999, leurs confrères yankees auront surtout attendu qu’un certain Steve Carell avoue sa virginité à l’âge de 40 ans.  Alors que les premiers sondent la personnalité du geek par l’entremise du genre, les seconds préfèrent l’approche plus classique de la comédie. Restent dans les deux cas une même tendresse véhiculée par un humour jamais hautain.  Et si le réalisateur d’En cloque, mode d’emploi n’a absolument rien à voir avec Paul, son influence n’en demeure pas moins bien palpable, comme si son univers et celui du « couple » Pegg/Frost étaient irrémédiablement amenés à se rencontrer d’une manière ou d’une autre. Heureusement pour nous, le résultat est loin d’être décevant.

 

 

Simon Pegg et Nick Frost dans Paul de Greg Mottola

 

Une réussite tenant en grande partie à Simon Pegg et Nick Frost qui signent ici leur premier scénario ensemble. Road movie ultra mouvementé dans lequel un alien vulgos embarque deux potes britons dans sa folle cavale, Paul permet au duo infernal de jouer avec les codes inhérents au genre via une plâtrée de références forcément emblématiques convoquant X-Files, Roswell et… Spielberg ! Et oui, le geek c’est chic ! Ecrit sur mesure pour une génération biberonnée aux rencontres du 3ème type, Paul transpire non seulement l’amour au genre et à ses aficionados, mais célèbre aussi l’amitié masculine dans ce qu’elle a de plus authentique. Plus buddy movie que comédie S.F., le film témoigne d’une générosité et d’une tendresse presque désarmantes. Que les amateurs de gaudriole se rassurent, le road trip de Greg Mottola ne lésine pas sur les blagues potaches et tord gentiment le cou à trente ans de pop culture via son savoureux personnage titre.

 

 

Jason Bateman dans Paul de Greg Mottola

 

Plus porté sur la clope que sur les sondes anales, Paul est une sorte d’ersatz d’E.T qu’on jurerait nourri à la Kronenbourg et aux films de Kevin Smith période Clerks. Le slacker intergalactique dans toute sa splendeur, personnifié par la voix caverneuse d’un Seth Rogen (The green Hornet) en très grande forme.  Armé d’un sacré débit oral, l’acteur parvient à donner une réelle tangibilité à cet alien pas comme les autres au point de l’ancrer totalement dans la réalité en faisant fi de sa constitution 100% virtuelle. Heureusement, le film ne se limite pas à son seul trio de potes et repose aussi sur une galerie de joyeux crétins allant du bouseux fondamentaliste aux men in black incroyables de bêtise assumé. Une peinture au vitriol de l’Amérique profonde qui n’est pas sans rappeler les mésaventures des Blues Brothers. Car oui, il y a un peu de John Landis dans cette drôle de virée à l’insolence souvent ravageuse quand elle n’est pas totalement iconoclaste. Devant un contrat des charges si bien rempli, les quelques défauts de l’ensemble paraissent bien mineurs. Expert ès film de potes depuis le culte Super Grave (produit par… Judd Apatow !) Greg Mottola se révèle on ne peut plus efficace, mais peine à faire le poids face à l’énergie et la désinvolture d’un Edgar Wright qu’on aurait rêvé de voir aux commandes. Enfin, si le film ne manque pas de peps, il pâtit d’un scénario ultra balisé que seules les conneries de Paul parviennent à booster, gagnant ainsi en dynamique comique ce qu’il perd en rythme. Doit-on pour autant bouder son plaisir ? Loin de là !

 

Improbable mix entre comédie potache pour geeks esseulés et divertissement familial,  Paul parvient à réconcilier deux conceptions bien distinctes du 7ème art comme autant de générations cinéphiliques.