Critique : Cloclo

 
Un film de Florent-Emilio Siri. Avec Jérémie Renier, Benoit Magimel, Marc Barbé. Sortie le 14 mars 2012.
 
Après le film d’action, le polar et le film de guerre, Florent-Emilio Siri s’attaque au biopic d’une des stars les plus populaires de la variété française. Mal aimé ou Lundi au soleil ?

 

Note : 4/5

 
Le retour du réalisateur de L’Ennemi intime a de quoi surprendre avec la biographie d’un des chanteurs français le plus populaire de son temps et l’auteur de la chanson la plus connue au monde (son adaptation anglaise notamment) « Comme d’habitude ». Trente quatre ans après sa disparition, Claude François renaît donc sous les traits de Jérémie Renier et devant la caméra de Florent-Emilio Siri. Si l’affiche du film n’évoque pas les paillettes et les claudettes, c’est bien parce que Cloclo dévoile une personnalité moins lumineuse qu’il n’y parait… Dans un tourbillon de paillettes, Claude François, « rock star », s’efface pour laisser place à sa terre natale : L’Égypte de 1939. C’est ainsi que le metteur en scène et son scénariste Julien Rappeneau nous introduisent dans cette vie peu ordinaire. Chronologique, le cheminement du chanteur guidé dès son enfance par la musique orientale se heurte à une figure paternelle rigide et incarnée ici par Marc Barbé. Aimé François alors contrôleur du canal de Suez, tient à une éducation quelque peu stricte et toute tracée pour son fils. Mais l’envie de musique est plus forte, la rupture se crée et le regret amer du fils Claude semble s’estomper le jour où il reçoit « My way » chanté par Frank Sinatra. Malheureusement, le modèle paternel et ses travers semblent déteindre sur lui. Caractériel, maniaque, homme à femmes et père peu présent auprès de sa femme et de ses enfants, le portrait du chanteur n’est pas complaisant et paraît sincère même si on sent des raccourcis narratifs. Malgré une durée de 2h20, le film ne semble jamais vraiment ralentir dû au train de vie du personnage, de ses envies et de surtout tout contrôler tel un Tony Montana.

 

Jeremie Renier dans Cloclo de Florent-Emilio Siri
© Studio Canal

 

La mise en scène de F-E Siri rend compte de cet aspect à des moments décisifs de la vie du personnage grâce à des plan-séquences maîtrisés et justifiés. Le souci du détail dans les décors, les costumes, la lumière et le son démontre une exigence et un talent à l’américaine qui sied au personnage de Claude François. Quand on sait que la plupart des ses innovations viennent de l’Amérique de Sinatra et d’Otis Redding, il faut saluer le travail du réalisateur qui signe un film qui comptera forcément dans sa filmographie singulière. Si Cloclo est l’affaire d’un seul homme, le film ne manque pas de seconds rôles intéressants avec des habitués du cinéma de Siri (Eric Savin, Marc Barbé), de jeunes recrues (Sandrine Seyvecou, Ana Girardot, Joséphine Japy entre autres) et l’actrice confirmée Monica Scattini (Chouffa, la mère François) qui trouvent le ton juste. Exception faite pour le rôle de Paul Lederman tenu par Benoit Magimel qui tombe un peu dans la caricature avec un maquillage forcé (rappelant là le Sean Penn de L’impasse) et un accent pied noir prononcé. Au final, il reste la formidable incarnation de Jérémie Renier. Cinq mois de préparation physique pour l’acteur n’auront pas été vain tant le résultat est crédible à l’écran. Tour à tour, colérique, fragile, charmeur, percussionniste / batteur et surtout chanteur – danseur; le rôle de Claude François n’est pas des plus faciles. Cloclo est un biopic qui ne peut laisser indifférent. Au regard de l’impact de la vie du personnage dans ses chansons (une découverte pour les néophytes), le « Alexandrie, Alexandra » final sonne d’un coup plus mélancolique et rappelle que Cloclo fut une star de la variété française innovante, portée le Jazz, la Soul et le Disco américain, comme on n’en a jamais revu.

 

Pour son premier biopic, Florent-Emilio Siri s’attaque à une icône et à un « sex symbol » de la variété française des années 60 – 70 avec une classe et une dynamique chères à son cinéma.