Un film de Jean-Marc Vallée avec Matthew McConaughey, Jennifer Garner, Jared Leto. Sortie le 29 janvier 2014.
Les « gay movies » ont la côte en cette période d’évolution des mœurs, sans s’avérer à la hauteur. On en attendait déjà beaucoup plus de Ma vie avec Liberace. Suivi de Dallas Buyers Club, une déception inégale et rébarbative, ça commence à devenir lassant… voire inquiétant.
Note : 2/5
Matthew McConaughey n’a pas toujours judicieusement enrichi sa filmographie. Entre comédies romantiques et divers navets, il s’est toutefois illustré dans quelques métrages dans lesquels il a créé la surprise. Avec un jeu subtil et riche, l’acteur est capable de dépasser son physique d’Apollon pour incarner des personnages complexes. Au-delà des Un mariage trop parfait, Comment se faire larguer en 10 leçons ou Tonnerre sous les tropiques, on retiendra surtout sa performance dans Magic Mike ou l’extraordinaire Killer Joe. Alors oui, McConaughey a cette fois-ci malmené son corps et détourné ces rôles sur-mesure de beaux gosses charmeurs et hypnotiques pour interpréter Ron Woodroof, un ancien champion de rodéo qui s’est battu – à sa manière – contre les diktats de l’Etat et les complots pharmaceutiques face au virus du Sida. Dans la peau de cet homme séropositif et rachitique, il perd plus de vingt kilos, mais est-ce qu’une telle mise en danger suffit à faire un « bon » film ? Contrairement aux idées reçues, la version romancée d’une histoire vraie n’est pas toujours une valeur sûre. Le biopic, ce n’est pas automatique. Bien qu’il en fasse des tonnes, le comédien ne parvient pas à convaincre car le reste ne suit pas. La réalisation est pesante, lente, cousue de fil blanc. Le passé des personnages n’est jamais creusé, de sorte qu’ils n’apparaissent pas réellement en trois dimensions mais plutôt, à la manière des cartoons, en deux.

Or, nous sommes loin des sujets de dessin animé. Et même, concernant une biographie, c’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité, ce n’est rien de le dire ! Fort heureusement, le rockeur Jared Leto porte à lui seul, de ses bras décharnés, ce qu’il peut sauver du scénario et de sa mise en scène. On le voyait déjà s’autodétruire dans le magistral Requiem for a Dream, il atteint aujourd’hui l’apogée de son art grâce à Rayon, le cliché du transsexuel exubérant qui ose se confronter à Ron et inverser la tendance pour mieux s’éteindre en toute sobriété, hors champ, à l’ombre des regards. Toute l’émotion est concentrée dans cet instant, alors qu’il nous est impossible de nous attacher à ce protagoniste repoussant que représente Ron, tant par le fric qu’il se fait sur le dos de « ses patients », sous couvert d’aider son prochain en proposant des traitements illégaux qui auraient fait leurs preuves, que par la maladie qui le ronge. L’interrogation qui persiste lorsque le générique de fin défile est : qu’a-t-on voulu nous montrer ? S’il n’est pas clair, le message ne semble pas être passé et il en résulte un sentiment brouillon, un flou que Jean-Marc Vallée a, a fortiori, réussi à nous communiquer. En un mot : fuyez !
Ne vous laissez pas amadouer par les prix obtenus en festivals et évitez ce film bancal. Il ne saurait tarder, le « gay movie » qui effacera l’ardoise…