Critique : Deadpool 2

 

Un film de David Leitch. Avec Ryan Reynolds, Josh Brolin, Zazie Beetz. Sortie le 16 mai 2018.

 

Une suite qui fait mouche quand elle n’est pas totalement phagocytée par l’égo de son sympathique mais trop envahissant acteur principal.

 

Note : 2/5

 

« Ce n’est pas très cinématographique ! » … cette phrase lancée en plein milieu de Deadpool 2 résume peu ou prou l’impression laissée par cette suite des aventures du Merc with a mouth, aka le super-héros le plus politiquement incorrect de l’univers Marvel. Sans révolutionner le genre, le 1er opus sorti en 2012, lui insufflait une fraicheur bienvenue de par son irrévérence (parfaitement contrôlée cela va sans dire), sa trash attitude et ses exactions gores qui détonnaient avec l’aspect très programmatique des autres productions Marvel. On lui aura surtout reproché un scénario trop simpliste et une mise en scène elle aussi très sage. Calée sur le sempiternel principe du « bigger,better &louder » cette suite était censée gommer ces défauts, apprendre de ses erreurs pour nous offrir un divertissement à l’ampleur aussi grande que la gueule de son personnage titre. Et peu importe si le réalisateur du premier film Tim Miller avait décidé de ne pas rempiler pour cause de « différents artistiques » avec Ryan Reynolds, l’arrivée de David Leitch, coréalisateur de John Wick et du percutant Atomic Blonde promettait une mise en scène inventive traversée de fulgurances à même de sortir Deadpool de la zone de confort dans laquelle il était prêt à s’installer. Malheureusement, c’est tout l’inverse qui se produit ici. Dès le vrai-faux générique d’ouverture dégoupillant un événement dramatique, le ton est donné : Deadpool 2 sera entièrement voué à la vanne de préférence méta et souvent située en dessous de la ceinture. C’est la marque de fabrique du personnage, le contrat passé dès le début avec le public, il n’y a donc pas tromperie sur la marchandise et donc à priori pas de plaintes à formuler, le public est là pour ça : rire de manière spontanée (a contrario des productions Marvel Studios qui jouent la carte du passage humoristique en force), s’offrir une forme de répit après les « émotionnellement chargés » Logan et Avengers : Infinity War. Sauf qu’ici, la blague prend tellement de place qu’elle phagocyte totalement un récit manquant singulièrement d’ambition et écrit comme un vague prétexte pour enchainer les « sales mots » en brisant le 4ème mur. Bien que trop schématique, l’intrigue du 1er film suivait une trajectoire scénaristique assez claire, ménageant blagounettes et séquences plus « dark » reposant ainsi sur une espèce d’équilibre somme toute relative mais qui avait au moins le mérite d’exister. Un équilibre que cette suite explose littéralement jouant de manière constante quitte à se cannibaliser. Et le film de recycler assez paresseusement les blagues de son prédécesseur (une référence à La Folle Journée de Fuerris Bueller devient ici un clin d’œil assez drôle à Un monde pour nous de Cameron Crowe, une main riquiqui ici remplacée par…autre chose !).
 

20th century fox
 

  Il faut bien l’avouer si les vannes marchent une fois sur trois ou quatre c’est surtout grâce à l’abattage d’un Ryan Reynolds toujours aussi bon dans ce rôle taillé sur mesure lui . Sans son charme, son attitude de sale gosse s’amusant à pirater les codes du film de super-héros, Deadpool 2 ne serait qu’une vaste fumisterie hypocrite se planquant derrière la blague pipi-caca pour masquer sa roublardise. [ATTENTION SPOILERS] Et si littéralement exploser la dynamique de groupe de la X-Force lors d’une séquence aussi drôle que déconcertante était en soi une bonne idée [FIN SPOILERS], ne jamais exploiter celle entre Deadpool et Cable (pourtant l’un des arcs les plus intéressants du comic d’origine) se révèle être une grave erreur. Entièrement vouée à son acteur principal, Deadpool 2 passe à coté d’intéressants antagonismes et surtout de son propos très « family friendly ». Domino (incarné par la très belle et très talentueuse Zazie Beetz), Cable, Peter…autant de personnages qui auraient pu se fondre parfaitement dans l’univers frappadingue de Deadpool et qui servent ici de faire valoir si ce n’est de prétexte à la blague et qui se voient totalement sacrifiés. Dommage car la volonté de vouloir proposer une alternative en faisant de l’apologie de la marge semble bien là mais le trop plein d’humour finit par le rendre totalement superficiel et vain. Dès lors on aurait pu espérer que la mise en scène de David Leitch sauve les meubles en apportant un peu de fantaisie, d’inventivité, notamment à travers le personnage de Domino dont le super-pouvoir (une chance surnaturelle) aurait pu donner lieu à de chouettes séquences. Que nenni, là encore la propension de Ryan Reynolds à vouloir tout désamorcer par l’humour finit par prendre toute la place. Une approche à double tranchant qui se révèle aussi drôle à certains moments que fatigante à d’autres. Là où il devient problématique c’est lorsqu’il se complait totalement dans ce dernier versant, relevant davantage du one-man show que de la tentative de piratage du film de super-héros, aussi programmatique dans son écriture que dans sa mise en scène. A trop désamorcer les attentes, Deadpool 2 finit par ne plus en susciter, son film se regardant alors comme un long sketch de Funny or Die. Ryan Reynolds avait toutes les cartes en main pour nous offrir une suite digne de ce nom, son ego a pris le dessus pour le meilleur mais plus souvent pour le pire !

 

En demi-teinte, Deadpool2 gonfle les défauts du 1er sans en transcender les qualités. Reste l’abattage d’un Ryan Reynolds toujours aussi génial. Pas certain que cela suffise à faire un bon film !

 

 
Et parce qu’on est pas des Deadpool mouillées, nous nous sommes penchés avec les amis de l’inestimable site FanFootage.fr sur le cas de Wade Wilson et ses potes. Enjoy !