Critique : Insaisissables

 

Un film de Louis Leterrier. Avec Jesse Eisenberg, Woody Harrelson, Isla Fisher. Sortie le 31 juillet 2013.

 

Louis Leterrier nous invite à un spectacle de magie efficace mais sans âme. Le hold up de l’été ?

 

Note : 2/5

 

Décidément, il ne fait pas bon sortir au cinéma un 31 juillet. Après R.I.P.D. , c’est donc au tour d’Insaisissables de rejoindre le panthéon des sorties estivales ratées. Sauf qu’aussi  perfectible soit-il, le film de Louis Leterrier transforme partiellement ses défauts en autant d’atout gâchés. Mais reprenons les choses depuis le début : Quatre magiciens, tous spécialisés dans un domaine bien précis, sont réunis par un mystérieux instigateur. Quelques mois plus tard, le quatuor remplit les salles grâce à des numéros défiant toutes les lois du temps et de l’espace. Mais tout ceci ne serait pas un écran de fumée destiné à dissimuler un plan autrement plus ambitieux ? Pourquoi ?  Comment ? Vous le découvrirez bien assez tard cher public ! C’est du moins ce qu’a du se dire l’ami Louis sur et certain que son grand numéro de magie allait mettre les spectateurs sur le flanc. Nanti d’un casting quatre étoiles, d’un cadre propice à tous les excès et d’un bon faiseur en guise de réalisateur, Insaisissables avait toutes les cartes en main pour devenir LE divertissement de l’été, le croisement idéal entre Le Prestige et Ocean’s Eleven. Et c’est en partie vrai : la magie opère au début grâce à une ambiance mystérieuse savamment distillée mais qui s’évapore au fur et à mesure que l’intrigue multiplie des effets de manche.  De prime abord efficace, Insaisissables devient de plus en plus prévisible au point de perdre en intérêt malgré des moyens employés toujours plus impressionnants. A l’image des multiples tours dont usent et abusent nos Gérard Majax de la cambriole, le film joue la carte de l’esbroufe pour mieux nous enfumer mais ne parvient jamais à nous émerveiller. Certes les numéros en imposent et gagnent graduellement en ambition mais ne servent au final qu’à masquer les imperfections d’un récit qui n’existent que pour ses morceaux de bravoure sans jamais se poser la question de la vraisemblance ou de l’ancrage dans une réalité tangible prompte à impliquer le spectateur.

 

©SND
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Là où un film comme Le Prestige interrogeait intelligemment la mécanique de l’illusion, Insaisissables, lui, l’utilise bêtement et finit par tomber dans son propre piège. Si le cinéaste fait preuve d’une vraie générosité c’est malheureusement au détriment du public et d’une intrigue qui vient à s’essouffler à force d’énormités. Reprenant à son compte l’adage d’Hannibal Smith qui aime « quand un plan se déroule sans accrocs », celui de nos magiciens manque cruellement d’enjeux pour nous captiver. Ici tout se déroule comme prévu sans aucun grain de sable si bien qu’on en vient à s’ennuyer poliment. C’est bien là l’énorme écueil d’un film qui confond ludisme et efficacité. Car aussi carrée soit elle, l’intrigue n’avait pas tant besoin d’artifices que de personnages forts. Or, il n’y en a pas dans Insaisissables : seulement des pantins destinés à être les engrenages d’un machine beaucoup trop bien huilée pour être honnête. Dommage car chacun d’entre eux avait un réel potentiel qu’il s’agisse du charmeur ou de l’escroc en passant par l’experte en serrures. Malheureusement, aucun ne dépasse le statut de figure imposée empêchant par là même toute réelle empathie. Autant d’écueils à mettre majoritairement sur le dos d’un récit paresseux, la réalisation passe partout mais néanmoins efficace de Louis Leterrier ne servant au final que de bouche trou à un scénario truffé de fils blancs dont le point d’orgue reste un twist final beaucoup trop alambiqué. Au final, Insaisissables donne l’impression d’assister à un spectacle de magie certes fastueux mais dont il nous tarde de connaître la fin pour feindre la surprise.

 

Beaucoup trop roublard et abracadabrant (c’est le cas de le dire), Insaisissables aurait pu être un excellent divertissement s’il avait davantage impliqué son public.

 

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