Critique : J.Edgar

Un film de Clint Eastwood. Avec Leonardo Di Caprio, Naomi Watts, Arnie Hammer. Sortie le 11 janvier 2012.
 
Vous connaissez J. Edgar Hoover ? Un peu, beaucoup, pas du tout ? Ca tombe bien, Dirty Harry nous en dresse un portrait sur des tons délavés.

 

Note : 3/5

 

Après le base-ball, les vieilles voitures et l’au-delà (pas forcément dans cet ordre), Clint Eastwood réalisateur s’attaque cette année au thème du biopic. Avec Leonardo Di Caprio dans le rôle-titre, ce film survole la vie et l’œuvre de J. Edgar Hoover, personnage historique de l’Amérique du XXè siècle, notamment connu pour avoir été le premier directeur de l’actuel Federal Bureau of Investigation de 1935 jusqu’à son décès en 1972. Sans suivre un ordre strictement chronologique, Eastwood aborde tour à tour la vie privée, publique et les événements notoires historico-politiques qui ont joué un rôle décisif dans  la constitution et l’organisation du Bureau of Investigation, qui deviendra ensuite le FBI, et l’ascension sociale d’une de ses figures de proue. De ses premières arrestations de malfrats aux dossiers secrets de la « chasse aux sorcières » qui a fait rage pendant la Guerre Froide, le film retrace avec force détails les événements marquants et les actions, légitimes comme discutables, qui ont mené J. Edgar Hoover a devenir une des personnalités les plus craintes mais également les plus fustigées de son époque, que ce soit par ses collègues de travail ou les six présidents américains qu’il a côtoyé durant leur présence à la Maison-Blanche.

 

Leonado Di Caprio dans J.Edgar de Clint Eastwood
© Warner Bros Pictures

 

En ce qui concerne l’aspect visuel du film, il est majoritairement dominé par le clair-obscur : des intérieurs surchargés des années cinquante jusqu’aux visages des personnages, nombreux sont les plans dans lesquels seuls quelques rais d’une lumière pâlotte viennent balayer l’obscurité ambiante. La photographie sombre, principalement filtrée par  des tons de gris et sépia, dessert une esthétique passéiste et rappelle par moments  des vieilles photos en noir et blanc ; mais elle est aussi une façon d’exprimer la part d’ombre que portent les personnages du film. En effet, bien que le but du film biographique soit de  relater des faits en se voulant fidèle à leur réalité, nombreuses sont les ombres au tableau de la vie de J. Edgar Hoover qui ont peu de chances d’être clarifiées un jour. Tant des rumeurs sur son homosexualité que sur les détails d’opérations confidentielles menées par le FBI et de dossiers secrets « disparus » après son décès, beaucoup sont les questions restées sans réponse. Eastwood les aborde du bout des doigts, presque sans y toucher, en variant les points de vue des interlocuteurs, conscient des versions qui diffèrent et des inexactitudes de l’Histoire.

 

Leonado Di Caprio, Naomi Watts et Arnie Hammer dans J.Edgar de Clint Eastwood
© Warner Bros Pictures

 

Globalement, le réalisateur se veut fidèle et respectueux de la prégnance historique du personnage ; il aborde la vie de cet individu sans chercher à faire de vagues ni de scandale.  Le film d’Eastwood dépeint un homme qui,  dans ses décisions justes comme celles iniques, dans ses actions bienveillantes comme dans celles qui lui firent du tort, agissait avec une foi inébranlable dans le système judiciaire, dans le but de combattre tout ce qu’il considérait comme une menace à la justice américaine, et avec la confiance d’agir dans l’intérêt de la nation. Une intégrité et une détermination brillamment interprétées par un Di Caprio qui prouve encore une fois qu’il est un des acteurs les plus doués de sa génération, qui s’investit dans ce rôle avec beaucoup de justesse.  Au final, J. Edgar est un film définitivement intéressant et qui jouit d’une excellente réalisation, mais dont le sujet restera peut-être hermétique de ce côté-ci de l’Atlantique où J. Edgar Hoover apparaît nettement moins dans nos livres d’Histoire ; et dont l’approche finalement assez consensuelle ne sera que peu génératrice d’intérêt. A voir si le personnage vous intéresse ou si vous êtes un inconditionnel de Clint.
 
 

Un Eastwood décent, mais qui aurait mérité plus de détermination, et dont le sujet échappera sans doute aux non-Américains. Bref, c’est intéressant mais ça ne casse pas des briques.