Critique : Le Hobbit – un voyage inattendu

 

Un film de Peter Jackson. Avec Martin Freeman, Ian McKellen, Andy Serkis. Sortie le 12 décembre 2012.

 

Peter Jackson nous replonge dans l’univers de Tolkien et nous offre un voyage plaisant à défaut d’être surprenant. Trop attendu peut être ? A peine !

 

 Note : 3/5

 

Depuis hier, vous avez pu lire que The Hobbit est un voyage pas si inattendu que ça ou qu’au contraire il se révèle enchanteur et bourré de surprises (du moment qu’on ne vous dit pas que Peter Jackson est australien !). Dès lors, bien difficile de se faire une première idée sur le nouveau film du réalisateur de Bad Taste. Déception relative ou grand morceau d’heroic fantasy ? Les deux mon capitaine ! Ah… Pas de panique : on a beau avoir été un peu déçus, le sentiment général reste globalement positif !  A la question The Hobbit marque t il un retour réussi dans les contrées de la Terre du Milieu? La réponse est indéniablement oui tant Jackson semble avoir tout compris à l’univers de Tolkien via non seulement une direction artistique à tomber par terre mais surtout cette propension à ne jamais faire dans la demi mesure visuelle. On peut reprocher tout ce qu’on veut au cinéaste mais certainement pas son manque d’ambition esthétique. Sur ce point, le film se révèle donc fort réussi et s’inscrit dans la droite lignée de la précédente trilogie. On pourra toutefois arguer qu’à trop faire dans le tout numérique, le film perd quelque peu en charme là où ses prédécesseurs eux n’hésitaient pas à opter parfois pour des effets spéciaux plus « manuels » (toutes proportions gardées bien entendu). The Hobbit manque ainsi par moments  de cette consistance, cette densité chez certaines créatures ou dans l’environnement qui leur conférait un ancrage plus « terrestre ». D’aucuns pourront arguer que c’est normal dans un métrage bourré de gobelins, trolls et autres peluches voraces… soit ! Ceci étant, Jackson a beau avoir calé son pas sur celui d’autres ayatollahs du CGI, il y a une chose qu’il a su conserver : son âme d’enfant. The Hobbit était peut être la nouvelle trilogie à réaliser pour s’amender de l’échec Lovely Bones (et encore cela reste à prouver), il s’y est attelé avec un plaisir non feint. D’autant plus notable qu’il est parvenu ici à retrouver cette pointe de malice déjà flagrante dans La Communauté de l’Anneau et ici diluée au sein de chaque personnage.

 

© Warner Bros France

 

N’allez pas croire que l’ami Peter nous a fait son remake de Blanche Neige et les sept nains, son film est davantage destiné à un large public qu’aux seules têtes blondes. L’humour  a beau être présent (mais pas plus que dans la précédente trilogie) et les protagonistes plus enclins à l’attachement des juniors, il y règne toutefois une vraie violence (quelques têtes coupées par ci par là) certes polie mais néanmoins présente. Pour les fans purs et durs de la première trilogie sachez donc que vous serez en territoire connu… … Trop connu peut être et c’est bien là le gros défaut de The Hobbit. On l’a dit plus haut le voyage organisé par Jackson est d’une beauté à couper le souffle et ce, en dépit d’une 3D relativement inutile (mais nous attendrons de voir le film en 48 fps pour nous faire une opinion définitive sur l’usage du procédé), il y règne toutefois un air de déjà vu. Vous le savez peut être : afin de transformer son épopée en nouvelle trilogie à succès , Jackson a du puiser son inspiration non seulement dans Bilbo le Hobbit mais aussi dans les appendices du Seigneur des Anneaux ainsi que 125 pages de notes additionnelles de Tolkien. Une décision à double tranchant qui enchantera les fans de l’auteur mais devraient agacer ceux pour qui l’univers de celui-ci n’a pas la même portée affective. Deux solutions s’offrent donc au spectateur : se laisser bercer dans cette balade riche en péripéties ou s’en tenir stricto sensu au livre originel et ainsi laisser poindre  un ennui somme toute relatif… d’autant que l’intrigue de Bilbo le Hobbit ne trouvera pas sa résolution dans ce volet.

 

© Warner Bros France

 

A trop élaguer son intrigue, Jackson n’évite pas le piège des redondances et autres effets de miroirs parfois gênants. Ici, ce qui gêne surtout ce n’est pas tant cette propension à tirer sur la ligne que les réminiscences flagrantes avec La Communauté de l’Anneau. Des échos qu’on ressent aussi bien au niveau des personnages (le Hobbit casanier mais frondeur, le prince déchu amené à marcher sur les traces de ses aïeux) que de la structure narrative. A l’image de La Communauté de l’AnneauThe Hobbit use d’un certain nombre de figures et autres pirouettes scénaristiques bien connus des aficionados sans toutefois faire preuve d’innovation. S’il n’en atteint pas les cimes émotionnelles (le gros défaut du film qui fonctionne sur une mécanique affective bien trop absente) ou épiques, The Hobbit est bien une sorte de jumeau de La Communauté de l’Anneau à la tonalité diamétralement différente. Par exemple, on notera qu’une fois affranchi de sa parenthèse elfienne, le film prend une toute autre mesure et devient sacrément prenant.  Dès lors, le métrage passe du stade de voyage (in)attendu à celui d’aventure en devenir avec son lot d’images magnifiques et de moments anthologiques dont le point d’orgue est la rencontre avec un Gollum plus que jamais humanisé par la prestation de ce génie d’Andy Serkis. Les promesses pour l’avenir se font alors plus concrètes et la frustration relative créée par cette épopée plaisante se transforme en réelle impatience. Le voyage aura été sinueux, tantôt dantesque, tantôt redondant, mais jamais ennuyeux et toujours plaisant grâce à au savoir faire et à la passion communicative d’un Peter Jackson heureux comme un Hobbit dans son hameau. Et c’est peut être bien ça le principal !

 

Peut être trop mécanique malgré lui, The Hobbit a contre lui un effet de surprise totalement dissout mais reste efficace et plaisant.