Critique : L’Ecume des jours

 

Un film de Michel Gondry. Avec Romain Duris, Audrey Tautou, Omar Sy. Sortie le 24 avril 2013.

 

Michel Gondry revient en France pour renouer avec son imaginaire foisonnant à travers l’adaptation d’un roman phare de l’œuvre de Boris Vian. Ouvrez bien grand les yeux et les oreilles !

 

Note : 3,5/5

 

Dès les premières images de la bande-annonce, il était clair que le réalisateur d’Eternal Sunshine of a spotless mind allait revenir à l’univers rétro moderne, mécanique et inventif qui a fait sa réputation de « clippeur » et de cinéaste. Le choix de L’Ecume des jours de Boris Vian ne pouvait que seoir à son imaginaire. L’auteur et le metteur en scène appréciant les allégories et le jazz, les deux artistes semblaient être faits pour se « rencontrer » un jour, hors du temps. Intemporel, le film de M. Gondry l’est tout autant que le récit de B. Vian. Colin et Chloé se rencontrent dans un Paris fantasmatique où on peut prendre un nuage suspendu au dessus des Halles en reconstruction, où le GPS est piloté via un Minitel sur des cartes en papier, où la nourriture, les vêtements et les objets s’animent. À travers l’utilisation de l’animation image par image, de trucages mécaniques et numériques et de projections d’images, le monde de L’écume des jours se déroule sous nos yeux ébahis par l’ensemble en action. Il faut saluer là, le travail des décors par Stéphane Rozenbaum et son équipe ainsi que la lumière et les cadres de Christophe Beaucarne et de ses assistants.

 

© UGC Distribution
© Studio Canal

 

Par son casting attachant (Audrey Tautou et Romain Duris), et audacieux (Gad Elmaleh, Omar Sy, Aissa Maïga et Charlotte Le Bon), le dernier long-métrage de Michel Gondry est encore plus vivant au delà de ses nombreux effets. La présence d’Omar Sy (second choix après le départ de Jamel Debbouze) dans le rôle de Nicolas le cuisinier / conseiller / chauffeur de Colin est bienvenue dans l’univers cosmopolite du film; tout comme Aissa Maïga dans le rôle d’Alise face à Chick sous les traits de Gad Elmaleh. Ce dernier, double antithétique de Colin, contraste bien avec le jeu de Romain Duris. Les quelques apparitions de « guests » sont bien senties également comme Alain Chabat en chef, Philippe Torreton en Jean-Sol Partre, Sacha Bourdo en souris ou encore l’ex Kid Créole, Auguste Darnell, qui incarne Duke Ellington. En deux heures et cinq minutes, M. Gondry a réussi à donner vie à une histoire d’amour allégorique sur la condition de l’homme moderne. Nul doute que cette adaptation ne laissera personne indifférent et nous ne pouvons qu’attendre pour revoir l’univers de Michel Gondry sur grand écran. Pendant ce temps, nous pourrons nous replonger dans l’Écume des jours avec plaisir. La vision de Michel Gondry est en pleine puissance sur l’ensemble du film mais elle diminue dès que ce dernier bascule dans sa partie tragique. Outre un effet de dé saturation des couleurs qui vire, au final, au noir et blanc (vignettage vintage inclus), la partie sombre de l’histoire de Colin et Chloé aurait mérité une véritable rupture visuelle pour changer le rythme et susciter une émotion plus grande et plus forte. Mais au delà de ce regret, cette écume apporte tant de poésie et de fantaisie qu’elle est enivrante.

 

 

Romance surréaliste saupoudrée de jazz et de trucages, L’écume des jours nous redonne à voir le fabuleux monde de Michel Gondry associé à celui de Boris Vian. Cependant, le réalisateur aurait pu remettre en cause cet univers sur la dernière partie pour en faire un très grand film.