Critique : Philomena

 

Un film de Stephen Frears. Avec Steve Coogan, Judi Dench,  Sophie Kennedy Clark. En salles depuis le 8 janvier 2014.

 

Philomena est un film gorgé de bons sentiments, qui évite de justesse la mièvrerie par son aspect subtilement tendancieux et son positionnement parfait entre le drame et la comédie.

 

Note : 3/5

 

Qui mieux que Stephen Frears pour l’adaptation du livre à succès Philomena ? Le réalisateur avait fait ses armes en portant à l’écran le sulfureux et non des moindres romans épistolaires de Choderlos de Laclos, Les Liaisons Dangereuses. Avec Philomena, le principe est donc le même : une mise en scène en demi-teinte, au plus près des personnages et de leur humanité, celle du vice et du « péché » mais aussi celle de la compassion et de la magnanimité, que le champ/contre-champ illustre avec efficacité. A l’image des Liaisons Dangereuses, Philomena réunit également un casting de « première classe ». Le tandem Michelle Pfeiffer/John Malkovich cède ici la place à une Judi Dench en grande forme, sensible et enjouée, rayonnante dans son accablement, et le brillant Steve Coogan, qui signe le scénario du film. Le talent de Frears consiste une fois de plus à créer une alchimie au sein même de ce duo improbable et improvisé. Autant comparer la rigidité du rôle de M dans James Bond et le potentiel humoristique de Damien Cockburn dans Tonnerre sous les tropiques. Pourtant, ça fonctionne bien du « tonnerre », malgré des personnages que tout oppose.

 

©Pathé Distribution
©Pathé Distribution

 

Lui a l’âge d’être son fils, elle est sexagénaire. Il est journaliste et cultivé, elle a bénéficié d’une éducation simple et achevé une carrière d’infirmière. La génération, le milieu social et l’érudition, mis en relief par des dialogues savoureux, les séparent. Ensemble, embarqués dans une sorte de road movie teinté de flegme britannique, ils vont envers et contre tout mener à bien leur quête de vérité. Philomena recherche son fils illégitime, vendu à de riches américains par les nonnes du couvent irlandais qui l’abritait, alors qu’elle n’était qu’une mère fille. Les circonstances font qu’elle croise près de cinquante ans plus tard la route de Martin Sixsmith, tout juste licencié et très réticent à l’idée d’écrire une sornette « larmoyante à intérêt humain ». Frears s’attache précisément à filmer ceci : l’impact de la providence et le poids des institutions qui nous dépassent. Celles, cruelles, de l’église, du monde professionnel et du système dans sa globalité. Le plan confrontant la titanesque représentation de Lincoln à l’échelle, humaine, de nos deux protagonistes, est brillant de véracité. Ainsi, dans une société pervertie, l’argent a-t-il réellement plus de valeur que la morale ? Une vaste problématique que suppute Philomena, avec la plus grande simplicité du monde.

 

Animé par une étonnante sobriété, une absence de prétention et un mélange entre humour et émotion, Philomena a tout pour plaire mais se confine à un « petit » film sympathique et bien mené, à la mesure de ses ambitions.

 

 



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