Critique : Robot and Frank

 

Une film de Jake Schreier. Avec Frank Langella, Susan Sarandon, James Marsden. Sortie le 19 septembre 2012.

 

 

Une fable futuriste gentillette emmenée par un Frank Langella convaincant et un robot attachant.

 

Note : 3,5/5

 

 

Dans un futur pas si lointain, Frank, septuagénaire chapardeur et acariâtre campé par Frank Langella, passe ses journées à végéter sur son canapé ou baguenauder en ville, en quête de nouvelles babioles pour étoffer sa collection de cleptomane retraité. Pour échapper à son quotidien fastidieux, ce vieux bourru au regard hagard peut compter sur les quelques appels de sa globe-trotteuse de fille Madison (Liv Tyler) passés entre deux missions humanitaires à l’autre bout du globe, les visites de son fils Hunter (James Marsden) et autres flirts partagés avec Jennifer, la charmante bibliothécaire du coin (Susan Sarandon). Reste que le bonhomme souffre de sérieux troubles de la mémoire – difficile pour un ancien pro du cambriolage de composer avec de telles lacunes –, de quoi alarmer sa progéniture… Car la sénilité latente du héros et les nouvelles technologies qui l’entourent ne font pas bon ménage et pour cause : l’écran plasma nouvelle génération est devenu le principal outil de communication avec Madison, damant le pion aux téléphones fixes, et les smartphones sont désormais transparents, du pain béni pour les adeptes de l’envoi de SMS en marchant. À cet essor technologique qui a embaumé l’Amérique toute entière, Frank préfère de vieux bibelots, kitsch au possible, qu’il subtilise chaque jour dans la même boutique de souvenirs, histoire de palier la vague d’innovations dont il est si peu friand. Alors forcément, lorsque son rejeton Hunter, trentenaire père de famille plutôt bien loti, lui fait cadeau d’un robot humanoïde dernier cri pour l’accompagner au quotidien, Frank fait grise mine, tel un marmot désappointé auquel on aurait refusé le joujou phare des cours de récré.

 

Frank Langella dans Robot & Frank
© EuropaCorp

 

Si, de prime abord, les relations entre Frank et son auxiliaire de vie 2.0 sont aussi crispées que les mouvements de l’automate, les tensions vont progressivement laisser place à une amitié humano-robotique plutôt attachante. Christopher Ford, à qui l’on doit le scénario, a choisi de broder son intrigue autour des liens que vont créer les deux protagonistes, dont la relation va donner lieu à des scènes assez cocasses. Cette nuance – l’un est programmé pour assurer la sécurité et le bien-être de l’autre, tandis que ce dernier ne pense qu’à reprendre du service –, utilise les codes du buddy movie avec ce tandem de héros aux antipodes l’un de l’autre et le vieux badaud se dévoile ainsi au contact de l’androïde, laissant poindre sa sensibilité d’ex-taulard pas tout à fait repenti. Peu enclin à laisser une bande de bobos transformer la bibliothèque de sa chère et tendre en une librairie ultramoderne, celui-ci va fomenter un cambriolage en initiant son robot à toutes les ruses afin de dérober un ouvrage menacé face au tout-numérique. En mêlant drôlerie, bons sentiments, humanité et robotique, le film a le mérite de dépeindre une histoire d’amitié atypique entre cet ancien au visage morne et ce nouveau cru de la robotique auquel même les plus réticents finissent par adhérer (y compris Madison, au départ farouchement opposée à l’idée de son frère et finalement conquise par cette machine à tout faire, même le ménage). D’ailleurs, la séquence de la tentative d’évasion avortée de Robot & Frank confinerait presque à un Thelma & Louise agrémenté d’une touche high-tech !

 

Un premier essai réussi de Jake Schreier, servi par un casting impeccable. Derrière chaque robot se cacherait-il un humain ?