Critique : Route Irish

 

Un film de Ken Loach. Avec Mark Womack, John Bishop, Andrea Lowe. Sortie le 16 mars 2011

 

Après l’excellent Looking for Eric, Ken Loach revient avec un film aux antipodes de son cinéma…

 

Note : 3,5/5

 

Pour son retour derrière la caméra, le réalisateur de Sweet sixteen prend tout le monde par surprise en signant un polar sec et nerveux ayant pour toile de fond l’Irak post 11 septembre. A la croisée des chemins entre film d’action et brûlot politique, Route Irish détonne par son ambiance et son approche. Si cet essai se révèle parfois bancal, il n’en demeure pas moins passionnant dans les thèmes qu’il aborde. Sur une trame rappelant furieusement la saison 7 de 24 heures chrono ( les milices privées opérant au Moyen Orient), le film de Loach fonctionne essentiellement sur l’anti sensationnalisme. Ici, on parle beaucoup, les interrogatoires se font par webcam interposées et les scènes d’action sont rares. Parfois maladroit, le cinéaste tente -tant que faire se peut- de renouer avec une certaine veine sociale et politique via des séquences faisant le grand écart entre Bagdad et Liverpool. Dommage que le sentiment d’urgence traduit lors des rares séquences d’action en Irak ne retrouve pas le même degré d’intensité une fois revenu en Angleterre.

 

John Bishop dans Route Irish de Ken Loach
John Bishop dans Route Irish de Ken Loach

 

C’est peut être là que se situe la plus grosse déception du film : dans son propension à aborder de manière ronflante une enquête pourtant fascinante sur le papier. Cependant, si les tenants et aboutissants de cette dernière se révèlent assez classique, l’ensemble gagne en intérêt lorsqu’il explore des versants plus psychologiques. A l’image  du génial Demineurs , Route Irish se veut une exploration de la psyché masculine dans ce qu’elle a de plus minérale. Boule de nerf qui ferait passer le Vic Mackey de The Shield pour un gentil organisateur de Club Med, Mark Womack (un habitué des séries TV britanniques) se révèle tour à tour et terrifiant et touchant en ex mercenaire totalement déglingué par ses faits d’armes. Une manière pour Loach de mettre en exergue la nature violente et nihiliste de l’homme exacerbée par la guerre.

 

Mark Womack dans Route Irish de Ken Loach

 

Le propos à l’air en soi simpliste mais se révèle très efficace à l’écran.  En témoigne une dernière partie où la violence devient le reflet d’un malaise ambiant. Dès lors, le film se fait plus tendu et assume parfaitement sa fonction de revenge movie à l’anglaise non sans s’être un peu pris les pieds dans le tapis avant.

 

Bien que mineure, la dernière œuvre de Ken Loach fait office de changement de cap bienvenu dans la carrière d’un cinéaste décidément pas comme les autres !