Critique : Split


Un film de M.Night Shyamalan. Avec James McAvoy, Anya Taylor-Joy, Betty Buckley. Sortie le 22 février 2017.

 

On pensait que M.Night Shyamalan avait perdu son sixième sens mais Split vient nous démontrer que le cinéaste est clairement incassable. Serait-ce un signe(s) ?

 

Note : 3.5/5

 

De M.Night Shyamalan on attendait plus grand chose malgré l’honnête mais au final assez conventionnel The Visit, found footage qui marquait surtout une volonté du cinéaste de revenir à ses fondamentaux d’artisan de la peur tout en se pliant à un cahier des charges ultra formaté. Et pourtant s’il est vrai qu’il faut se méfier de l’eau qui dort cela est d’autant plus avéré dans le cas de Shyamalan qui, avec Split, revient en pleine possession de ses moyens après une longue période d’errance dans les méandres du navet (Phénomènes, Le dernier maître de l’air, After Earth, on en parle?). Dans ce vrai faux/thriller psychologique faisant étrangement écho à L’Esprit de Caïn de Brian De Palma, on suit le calvaire de trois jeunes filles enlevées par un mystérieux schizophrène abritant pas moins de 24 personnalités. Mais des trois proies, une seule se distingue réellement des autres. Commence alors un éprouvant jeu du chat et de la souris durant lequel la prisonnière et son geôlier se découvriront des ressources insoupçonnées. Difficile d’en dire plus sans effleurer ce doux parfum de mystère sur lequel Split capitalise énormément. Car oui, Split, est un Shyamalan pur jus, dans la lettre comme dans l’image. Un savoureux dédale mentale que le cinéaste prend un malin plaisir à remodeler (à l’image de son protagoniste en perpétuel mutation) au fur et à mesure pour mieux cueillir un spectateur perdu avec délectation jusqu’à la séquence post-générique redistribuant intelligemment les cartes au point de lui redonner une toute autre interprétation.

Universal Pictures

 

Il y a deux films dans Split : le premier est un survival efficace, le second est une sorte de « pierre angulaire » d’une cohérence total avec l’univers que bâtit Shyamalan depuis Sixième Sens. Mais davantage encore que sa place fatalement centrale dans la filmo de Shyamalan, c’est surtout son approche de la schizophrénie qui fait de Split un objet unique en son genre. Scrutant le mal autant du point de vue psychanalytique que surnaturel, le film balade constamment le spectateur entre ces deux extrêmes sans jamais jouer la carte de la roublardise. Une ambivalence judicieusement gérée jusqu’au bout et à laquelle la prestation de James McAvoy donne encore plus de poids. Monstrueux dans tous les sens du terme, l’acteur dévoile une palette variée et fascinante qui renforce un malaise diffus qui ne quittera jamais vraiment le spectateur. Toujours sur le fil, il se livre ici à une véritable performance justifiant presque à elle seule le déplacement. On regrettera toutefois que l’acteur et le comédien ne s’amusent pas davantage avec leur formidable postulat de départ ne laissant entrevoir que quelques-unes des personnalités de son anti-héros fragmenté dans tous les sens du terme. Dommage aussi qu’à trop vouloir déjouer les attentes, Split tourne parfois en rond. En effet, ne vous attendez pas à un twist à la Shyamalan (du moins pas au sens « classique » du terme) ce Split-là verse davantage dans le prolongement que dans la continuité. Des propos qui peuvent paraître sibyllin mais qui feront totalement sens une fois que vous aurez embarqué dans le nouveau train fantôme concocté par le cinéaste.

 

A défaut d’être le meilleur film de Shyamalan, Split demeure l’un de ses plus personnels car en totale adéquation avec son univers singulier où l’extraordinaire côtoie le quotidien.