Critique : Transformers 4 – L’âge de l’extinction

 

Un film de Michael Bay. Avec Mark Wahlberg, Nicola Peltz, Jack Reynor. Sortie le 16 juillet 2014.

 

Michael Bay abandonne ses tics les plus agaçants pour livrer un divertissement ludique, fun… et lisible. Tout fout le camp !

 

Note : 3,5/5

 

Michael Bay a réalisé un bon film… une phrase qui peut paraître étrange surtout de la part d’un rédacteur qui n’a pas caché sa déception pour Transformers 2&3 (cf. critique) plaçant même ce dernier dans le trio de tête de son flop 2011. Mais voilà, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis et il faut bien reconnaître que depuis peu l’ami Bay file un sacré bon coton. L’année dernière déjà No Pain no Gain prouvait par l’image que le monsieur pouvait être intéressant quand il décidait de mettre son style au service de l’histoire, et non l’inverse. C’est plus ou moins le même syndrome qui se reproduit avec Transformers 4 à la différence près que le cinéaste a cette fois décidé de mettre le holà sur cette beauferie totalement assumée qui rendaient la plupart de ses œuvres insupportables. Exit donc les blagues graveleuses, racistes et autres gros plans sur de généreuses fesses féminines ou ce qui pouvait s’apparenter à des couilles de robots. A la trappe aussi les seconds couteaux insupportables cabotinant à mort et de manière totalement gratuite. Le cinéaste a visiblement décidé de mettre de l’eau dans son vin en rabotant méchamment ses tics formels les plus agaçants comme s’il avait enfin conscience que le metteur en scène devait prendre le dessus sur l’égomaniaque qu’il était jusque là. Si bien qu’on ne peut qu’être surpris par l’accueil glacial que la presse américaine (et certainement une certaine frange de la presse française) a réservé à son film tenant ici davantage du délit de sale gueule que de la prose savamment argumentée. Oui c’est injuste et absolument pas mérité. On ne va pas ici se transformer subitement en pro Bay mais force est de reconnaître que la démarche du réalisateur va ici dans le bon sens, phénomène suffisamment rare pour être signalé.

 

© Paramount Pictures
© Paramount Pictures

 

Pour cette 4eme aventure robotique, Bay a eu la très bonne idée de faire table rase du passé en proposant une approche totalement différente. Il faut dire que ce nouvel opus a la très bonne idée d’abandonner totalement l’irritant Sam Witwicky (Shia LaBeouf) pour se concentrer sur Cade Yeager (Mark Wahlberg) père de famille ultra protecteur qui, après avoir découvert Optimus Prime par inadvertance va aider ce dernier à échapper à d’inquiétants men in black et un adversaire de taille, Lockdown bien décidé à liquider tous les Transformers. Si les tenants et aboutissants restent sensiblement les mêmes (Optimus Prime et ses amis humains doivent sauver la planète d’une destruction imminente), Bay semble avoir compris que la réussite d’un bon blockbuster tient aussi dans l’élaboration de personnages suscitant un minimum d’empathie et dont la trajectoire est ici suffisamment intéressante pour qu’on accepte de se laisser embarquer avec eux. Impeccable en papa poule un peu déboussolé, Wahlberg parvient à insuffler l’humanité qui manquait cruellement aux précédents opus, bien entouré qu’il est par le couple Nicola Peltz/Jack Reynor mimi et jamais tête à claques. Idem pour Stanley Tucci et Kelsey Grammer d’une dignité absolue en bad guys consuméristes. L’occasion pour le réalisateur de parer son film d’un étonnant propos anti militariste. Oui, oui, vous avez bien lu Transformers 4 fustige l’armée et met en sourdine le patriotisme échevelé des précédents films de Bay. Il faut le voir pour le croire !Sans jamais en faire trop ou pas assez, Michael Bay signe ici un divertissement à l’approche étonnamment sobre préférant se concentrer sur le récit et l’action que sur la mise en application d’effets souvent superflus. Profonde remise en question ou aveu de défaite devant les attaques répétées des haters ? Difficile à dire mais on a envie de croire que le réalisateur a pris note des critiques qui lui ont été adressés sans toutefois se renier. Moins mégalo mais toujours aussi ambitieux, le papa de Rock nous offre ici une aventure épique et iconique à souhait (Optimus Prime libérant les Autobots) blindée de morceaux de bravoure mené à un rythme d’enfer. On vous rassure : le monsieur aime toujours autant tout faire péter mais le fait ici avec un poil plus de lisibilité ! Fort bien exécutées, les séquences d’action s’enchainent de manière métronomique mais de façon suffisamment espacée pour permettre au spectateur de respirer sans se sentir agressé et constamment interpellé.

 

© Paramount Pictures
© Paramount Pictures

 

Dommage toutefois que la dernière partie pêche quelque peu par gigantisme : à trop enquiller les affrontements mis en parallèle, Bay finit par nous perdre dans ceux-ci, si bien que le spectateur ne sait plus très bien qui est qui ou qui fait quoi. Un « flou artistique » certain dans le dernier tiers qui n’enlève cependant rien au plaisir ressenti. Comme quoi il est possible pour un film du Bayhem d’être véritablement fun quand il n’est pas totalement phagocyté par l’égo de son géniteur. Plus modeste que d’habitude, le cinéaste se permet même de prêter allégeance au cinéma de Spielberg lors d’un assaut final faisant clairement référence à Jurassic Park (les robots en plus, la candeur en moins) filant de sacrés frissons ! Et lorsqu’il s’aventure à l’autocitation c’est pour mieux se moquer gentiment de lui-même si bien qu’on ne peut s’empêcher de déceler une once de malice quand il fait dans le placement de produits ostentatoire. On sera un peu moins avenant lorsqu’il cite de manière un peu trop lourdingue H.R. Giger, mais franchement on préfère largement Michael Bay version fanboy qu’en mode beauf intégral élevé au mais et à la Bud ! Malgré une durée rédhibitoire de 2H45 (le film aurait largement pu être amputé d’une bonne demi-heure) Transformers 4 reste un divertissement sympathique car traité avec une relative « sobriété ». Régressif mais pas couillon, ce 4eme volet a le mérite de ne pas pendre son public comme un simple bœuf bouffeur de pop corn mais comme des spectateurs désireux de retomber en enfance pendant trois heures sans être pris pour un crétin absolu. Et si l’on voulait synthétiser Transformers 4 et, de manière plus globale, la manière dont Michael Bay envisage son cinéma, on pourrait la résumer à cette séquence où Yeager et son associé visitent un multiplexe délabré, lieu magique qui servait surtout à « serrer des filles ». Sans jouer aujourd’hui les apôtres pro Bay on pourrait arguer que le monsieur tente de nous dire qu’il a toujours envisagé ses films comme une expérience collective où des millions de choses peuvent se dérouler devant et derrière l’écran, libre alors au spectateur d’approuver la méthode ou non.

 

Avec Transformers 4, Michael Bay signe tout simplement le meilleur opus de la saga.


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