Le cinéma et les jeux vidéo ont toujours eu une relation ambiguë entre crainte, fascination et snobisme. Pour les producteurs de films, les jeux vidéo étaient longtemps perçus comme pas assez bien pour toucher un large public. Divertissement pour geeks et adolescents boutonneux, les jeux vidéo se sont vus petit à petit adaptés sur grand écran et leurs rapports sont devenus plus complices. Idéal support pour produit dérivé d’un film, le jeu vidéo est aussi une source importante d’inspiration au même titre que la littérature. Pour le jeu vidéo, le cinéma et sa technique sont un moyen pour se perfectionner, attirer de nouveaux publics et impressionner.
La fascination l’un pour l’autre
Le cinéma n’a pas attendu l’apport du jeu vidéo pour faire des films d’actions mais les jeux ont toutefois inspiré certains producteurs car c’était l’occasion de mettre en scène un héros ou une héroïne, solitaire, qui tire sur tout ce qui bouge : un personnage increvable comme le cinéma les aime. Les Tomb Raider, Resident Evil, Prince of Persia ou Max Payne sont de cette trempe. Avec l’aide des effets spéciaux, tous les jeux sont adaptables et plus il y a de sang, de monstres, d’action et mieux c’est. Avec des consoles toujours plus puissantes, les jeux deviennent de plus en plus sophistiqués. Les coûts de production s’envolent et les stratégies marketing ressemblent de plus en plus à celles des distributeurs de films. Le marché du jeu vidéo, qui se porte toujours aussi bien malgré la crise (41,9 milliards d’euros en 2011), notamment grâce à l’essor des jeux sur smartphones et tablettes, peut se permettre de dépenser beaucoup pour la réalisation des jeux. Outre des graphismes de plus en plus réalistes (jeux de foot, Goldeneye Wii) où les personnages ressemblent aux acteurs et aux sportifs qu’ils sont sensés représentés, les jeux sont de plus en plus scénarisés. Ainsi, Goldeneye Wii, en tant qu’adaptation du film reprend l’histoire du film et la modifie à sa sauce mais surtout ce qui est frappant c’est de voir qu’un générique comme celui des films de James Bond est implanté entre la première et la deuxième mission.

Un autre exemple de l’influence de la scénarisation cinématographique sur le jeu vidéo est Metal Gear Solid sortie sur Playstation en 1999 eu Europe (et ses suites). Outre les nombreuses qualités techniques de ce jeu, on se souvient des différentes cinématiques qui ponctuent l’histoire, véritables extraits de films d’archives sensés illustrer les propos des personnages. Rares sont les jeux où des images de prises de vue réelles sont intégrées en parallèle avec les images du jeu conçues par ordinateur. Les cinématiques dans la saga Metal Gear Solid sont très (trop) abondantes et complètent les phases de jeux pour donner encore plus de vie au scénario. Les dialogues entre personnages sont pléthores mais c’est parfois un peu trop car cela ralentit le rythme de l’action. Le jeu n’emprunte pas au cinéma que la technique visuelle. La musique de la série des Metal Gear Solid, depuis le numéro 2, est composée par Harry Gregson-Williams à qui l’on doit de nombreuses musiques de films (Domino, Souris City, Total Recall 2012, etc.). Metal Gear Solid est probablement l’un des jeux les plus proches du cinéma, l’un des plus adaptables mais le film justement se fait attendre et des rumeurs laisserait penser qu’il serait en préparation…

Des adaptations ratées de jeux
Les adaptations de jeux vidéo donnent rarement des chefs d’œuvres cinématographiques. La faute à des réalisations ternes (les scénaristes et metteurs en scènes ont-ils réellement joué aux jeux qu’ils adaptent ?) et des types de jeux difficilement adaptables. Par exemple, l’intrigue d’un Super Mario Bros est des plus linéaires et classiques, celle de Tomb Raider également. On imagine mal un film de deux heures avec une héroïne sauter sur des blocs, aller de liane en liane, tirer sur des tigres, des lions, des momies… Les deux Tomb Raider n’ont été qu’une pâle copie d’un Indiana Jones au féminin peu fidèle à l’esprit des jeux et ne reprenant pas leur trame et encore moins la musique qui collait parfaitement à l’ambiance et qui compta pour beaucoup dans la qualité des jeux. Pour Super Mario Bros, sorti en 1993, les personnages principaux ont été repris mais l’histoire a dû s’adapter pour en faire un film avec des acteurs en chair et en os dans une époque contemporaine. On ne peut pas vraiment dire que Dennis Hopper campe un Koopa proche de la tortue du jeu vidéo. Mais en reprenant l’esthétique du jeu, l’ensemble aurait été encore plus kitch. Street Fighter, l’ultime combat, sorti en 1994 est une adaptation difficile car il a fallu écrire une histoire crédible de manière à inclure tous les personnages de ce jeu de combat. Le casting était intéressant (Van Damme, Raoul Julia, Kylie Minogue), les personnages sont fidèles (notamment les costumes) mais ça ressemble quand même beaucoup à une grosse série B, idéale pour les rayons de vidéos clubs et les chaînes câblées. Parmi ce paysage de nanars et de séries B émerge un film très réussi qu’est Silent Hill, inspiré de la série de jeux vidéo sortie sur Playstation. Tant le scénario, la mise en scène et l’esthétique font référence au jeu et surtout font figure d’un film longuement médité et réalisé avec soin. Il n’en est rien pour sa suite Silent Hill : Révélation 3D.

Des adaptations de films réussies
Quand on voit l’abondance de jeux vidéo adaptés au cinéma où le nombre de grands succès du septième art adaptés en jeu, on se dit qu’il s’agit plus de pousser à l’extrême le marketing et le culte des produits dérivés que de chercher à faire un grand jeu. Pourtant il existe des contre-exemples comme l’adaptation de Goldeneye sur Nintendo 64 en 1997. Considéré à raison comme l’un des meilleurs jeux de la console, voire l’un des meilleurs jeux de tirs de tous les temps, il a révolutionné le genre du « first-person shooter » (FPS), type de jeu où la vue est subjective. Le joueur se sentait vraiment à la place du personnage, procédé rendu possible grâce à l’arrivée de la 3D sur console. Proposant le mode multijoueur le plus développé avec un nombre important d’arènes, de personnages, d’armes, c’était l’occasion de parties endiablées avec ses amis. Le jeu a eu tellement de succès que le développeur Rare a décidé de créer une « fausse » suite, Perfect Dark, reprenant surtout le style, aussi bien pour le mode solo que pour le mode multijoueur.

Des films où les jeux vidéo sont le thème principal
Rares sont les films où les jeux vidéo sont au cœur de l’intrigue. Il s’agit parfois d’un personnage voir d’un lieu à part entière. Dans les années 80, le film Disney Tron a marqué toute une génération avec son graphisme particulier. Des individus se retrouvaient piégés dans un programme informatique, une sorte de jeu vidéo géant. Aujourd’hui, le film est surtout très kitch et laid mais il a certainement plu aux geeks de l’époque. Video Kid ou The Wizard, en version originale, est l’histoire d’un enfant à moitié autiste, qui ne parle plus depuis que sa sœur jumelle est morte. Les jeux vidéo sont le seul moyen pour lui de s’exprimer et il est devenu un vrai champion toute catégorie confondue. Au terme d’un périple accompagné par son grand frère et une fille, il participe à un concours et remporte la finale au cours de laquelle le public nord-américain découvrit en avant-première le jeu Super Mario Bros 3 (sorti quelques mois plus tôt en Europe et au Japon). Petit film sans prétention mais émouvant, Video Kid est l’un des rares films à laisser au jeu vidéo une grande place dans le scénario. Enfin, le Disney de Noël 2012, Les Mondes de Ralph, est l’hommage ultime aux jeux vidéos, et notamment aux jeux d’arcade. Plus qu’un personnage, le jeu est l’univers dans lequel se déroule l’action du film. Après les jouets de Toy Story, Disney s’adresse à une nouvelle génération et on apprécie de retrouver des personnages de jeux ayant réellement « existés » (Bowser, Monsieur Bison, le méchant de Pacman, etc.) et des personnages crées de toute pièce pour le film.
