Critique : Les Gardiens de la Galaxie 3

Un film de James Gunn. Avec Chris Pratt, Zoe Saldana et Bradley Cooper. Sortie le 3 mai 2023.

Préparez vos walkman et chargez vos blasters, Les Gardiens de la Galaxie reviennent pour une dernière virée. En route (mauvaise) troupe !

Note : 3,5

Les pieds-nickelés de l’espace
Après neuf ans de bons et loyaux services, Les Gardiens de la Galaxie, tirent leur révérence à l’occasion d’un troisième opus aux airs de retour aux sources. Un adieu aux armes qu’on nous promet émouvant et épique mais dont le cœur émotionnel ne réside pas tant dans son intrigue somme toute très balisée que dans le cheminement personnel et intérieur de ses protagonistes. On se gardera toutefois bien de qualifier ce nouvel opus d’intimiste tant il s’inscrit dans la droite lignée de ses prédécesseurs et offre le même cocktail à base d’humour et d’action débridée le tout sur fond de bataille comme un méchant mégalomane ambitionnant rien de moins que de façonner l’univers à son image. Rien de nouveau sous les étoiles à la différence près que de nombreux évènements sont venu s’insérer entre les deux derniers films. Nous retrouvons donc nos gardiens de la galaxie coulant des jours paisibles autour d’un Peter Quill inconsolable d’avoir « perdu » Gamora revenu d’entre les morts – ou plutôt du passé via un joli numéro d’équilibriste scénaristique (cf.Avengers Endgame) – mais n’ayant aucun souvenir de ses aventures auprès des Gardiens. Si vous n’avez plus pris la locomotive Marvel depuis un certain temps, nous ne pouvons que vous conseiller de rattraper votre retard avec le diptyque Avengers : Infinity War/Endgame et l’horripilant – pour être poli- Thor : Love and Thunder. Pas un impératif en soi mais un « résumé des épisodes précédents » devrait vous aider à ne pas vous sentir trop largués durant les premières minutes. Mais revenons à nos moutons spatiaux, nos gardiens donc profite d’une semi-retraite bien méritée jusqu’à l’arrivée tonitruante d’Adam Warlock, sorte de Superman ayant abusé de la peinture dorée, venu kidnapper Rocket pour le compte d’un mystérieux commanditaire. Les Gardiens étant passé maitre dans l’art de tout faire foirer – y compris les plans de leurs ennemis – c’est au chevet d’un Rocket mortellement blessé qu’ils se trouvent. La mission devient alors simple : sauver leur ami à tout prix quitte à foutre le boxon dans toute la galaxie. Personnage ultra charismatique dissimulant des fêlures béantes derrière son ironie mordante, Rocket est au cœur de ce dernier volet et voit son passé exploré de fond en comble au cours de flash-backs tour à tour attendrissant et déchirant. L’occasion pour James Gunn, qui n’a jamais caché son attachement pour les animaux, de dénoncer ouvertement la torture animale à travers l’histoire de Rocket.

Copyright Marvel Studios

Le cœur à l’ouvrage
De toutes les franchises constituant l’univers cinématographique Marvel, Les Gardiens de la Galaxie est certainement celle qui au cours de sa brève mais intense existence aura suscité le plus de sympathie. Un tour de force en soi à mettre au crédit de personnages truculents rendus terriblement attachants dans leurs défauts. Qu’on les aime ou qu’on les déteste Les Gardiens de la Galaxie ont toujours su se distinguer en se faisant le reflet de la personnalité éminemment pop de leur géniteur James Gunn, enfant terrible de la série Z (il a fait ses armes chez Lloyd « Troma » Kaufman) devenu petit à petit poil à gratter de la scène indépendante avant d’être propulsé Golden Boy du MCU et désormais « passé à l’ennemi » en devenant président de DC Studios. Un parcours comme Hollywood les affectionne tant mais qui – pour le moment – n’aura pas totalement vampirisé le monsieur qui met un point d’honneur à insuffler sa personnalité iconoclaste mais toujours tendre au sein de chacun des projets qu’il chapeaute. C’est ce même mélange de décontraction et de respect – à la fois pour ses personnages et pour le public – que l’on retrouve dans ce troisième volume des Gardiens de la Galaxie. Un opus aux airs de requiem donc mais qui vient davantage clore le parcours personnel des protagonistes que véritablement sonner la fin d’une ère. Et si le leitmotiv sur la nécessité de lâcher prise pour aller de l’avant est assené avec la finesse d’un Drax dopé aux hormones spatiaux, il est aussi là pour nous rappeler ce qui rend cette franchise si attachante : son cœur.

Copyright Marvel Studios

Les Gardiens de la Galaxie 3 tout comme ses prédécesseurs est un film qui n’en manque pas et s’appuie sur une dynamique de groupe incroyablement efficace, fonctionnant par binômes. Cette singularité elle est à mettre au crédit d’une écriture terriblement efficace que ce soit dans les échanges entre les personnages ou sa manière d’alterner tempo comique et action débridée avec un vrai sens du tempo. En parlant de tempo, difficile de ne pas évoquer la playlist concoctée pour cette suite et véritable marque de fabrique d’une franchise qui aura toujours revendiquée haut et fort sa personnalité forte en gueule. Et de la gueule il en fallait pour imposer au sein du très poli MCU, un univers kitsch et totalement iconoclaste qui aura su très rapidement se faire une place dans le cœur du public. Mêlant l’iconisation à l’absurde, érigeant celle-ci au rang de véritable dispositif narratif, Les Gardiens de la Galaxie 3, fait partie de ces heureuses aberrations dont l’existence au sein d’un écosystème ultra balisé a quelque chose de profondément salutaire. De quoi nous faire oublier les quelques faiblesses de l’ensemble à commencer par un Andy Warlock sous exploité, sorte de fils à maman, réduit ici au rang de simple péripétie quand il n’est pas un ressort comique totalement surfait. Nous l’avons évoqué plus haut, nos gardiens de la galaxie sont plus que jamais au centre de cette nouvelle aventure. On aurait toutefois aimé que ce cap « intimiste » soit englobé au sein d’une dramaturgie à la hauteur des enjeux émotionnels construits par Gunn. Malheureusement force est de reconnaitre que le personnage de Maitre de l’Evolution formidablement interprété par Chukwudi Iwuji n’est que le reflet de l’incapacité de Marvel a crée un antagoniste digne de ce nom après Thanos. Tout comme Kang dans le très laid Ant-Man Quantumania, Le Maitre de l’Évolution n’est qu’une pâle copie de Thanos au point d’en piquer les motivations. Pour n’importe quel autre Marvel cela aurait été hautement préjudiciable mais pas ici. Non pas que le film suscite l’indifférence, bien au contraire, il est là pour nous rappeler qu’une aventure, aussi épique soit-elle, n’est rien sans ses protagonistes et que la plus belle odyssée n’est peut-être pas forcément celle qu’on croit.

A l’image des deux précédents films, Les Gardiens de la Galaxie 3 emporte l’adhésion par sa vraie/fausse décontraction et son amour immodéré pour des personnages aux parcours définitivement surprenants.